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Victor Hugo faisait volontiers largesse de ses ouvrages, parfois même en les revêtant d’une reliure assortie, et l’on tenait soigneusement compte à la librairie des exemplaires et des frais de reliure à porter au compte de l’auteur ; mais il ne paraît pas que Renduel les réclamât très vivement, le moment venu, car je possède une facture dressée pour tous les exemplaires que le poète avait pris ou fait relier de novembre 1835 à janvier 1837, et elle est restée telle quelle entre les mains du libraire : elle s’élève à 239 volumes et à 179 francs de reliure. Quelques détails curieux : le 20 août 1836, Victor Hugo faisait envoyer au curé de Fourqueux ses œuvres complètes en vingt volumes, reliées pour 40 francs : c’est à Fourqueux, près Saint-Germain-en-Laye, que la famille Hugo allait en villégiature et que la jeune Léopoldine Hugo fit sa première communion. Le 22 mars 1837, il adressait ses Feuilles d’automne, brochées, à Henri Journet, et le 2 avril ses deux volumes d’Odes et Ballades, brochés, à Auguste Vacquerie. Le 17 du même mois, Auguste de Châtillon était gratifié des six volumes de drames, brochés, et le 23, Mlle Taglioni recevait en hommage Notre-Dame de Paris en trois volumes, reliés pour 8 francs ; enfin, le 18 mai Bernard de Rennes recevait à la fois Han d’Islande et les Odes, Cromwell et Hernani, brochés. Le 18 juillet 1837, Hugo adressait à M. de Féletz les Voix intérieures, brochées, et le 31 du mois de juin, il avait fait le même cadeau à Chateaubriand. Voilà pour les envois les plus significatifs.

Une révélation toute littéraire pour clore ces questions d’intérêt, qui ont bien leur importance quand il s’agit d’ouvrages de cette valeur. J’ai vu, de mes yeux vu, le traité en date du 25 août 1832, par lequel Victor Hugo s’engageait à réserver à Renduel les trois mille premiers exemplaires d’un grand roman intitulé le Fils de la Bossue aux conditions antérieurement stipulées pour d’autres ouvrages avec Renduel ou Gosselin. Rien que deux articles, le second atténuant le premier en établissant qu’aucun délai n’était fixé à l’auteur pour la remise du manuscrit. Renduel, on le sait, n’eut jamais à publier le Fils de la Bossue, non plus que la Quiquengrogne ou le Manuscrit de l’Évêque, pour lequel il avait pareil engagement de l’auteur et qui devint l’épisode de l’évêque Myriel dans Fantine, des Misérables. Lorsque l’éditeur Lacroix traita avec Hugo pour les Misérables, il fut averti par