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préalable : une organisation plus rationnelle, plus régulière de l’Empire ne sera possible que le jour où la Grande-Bretagne aura à traiter, non pas avec une multitude de pays isolés, dont les intérêts et les prétentions ne s’accorderont pas, mais avec quelques grands groupemens politiques offrant une consistance sérieuse. Nous avons dit que les colonies anglaises de peuplement se répartissent en trois groupes : le Canada et Terre-Neuve, l’Australasie, l’Afrique du Sud. Pour que la fédération puisse aboutirai est indispensable que l’unité s’établisse d’abord dans chacun de ces groupes, que les diverses provinces qui les composent se soient réunies, tout en se réservant des libertés régionales aussi larges qu’elles le voudront, pour organiser un gouvernement central qui les représente toutes et domine les autorités provinciales. Si elles n’arrivent pas à s’entendre entre elles à ce sujet, il est clair qu’elles ne pourront le faire avec des pays bien plus éloignés et plus différens, pour l’œuvre, beaucoup plus compliquée, de la fédération impériale. Or cette unité existe déjà en un point : au Canada dont les provinces sont fédérées depuis 1867, et ont un parlement commun, tout en ayant conservé au-dessous de lui les parlemens provinciaux, et ne forment qu’un seul territoire douanier, contenant cinq millions d’habitans. Terre-Neuve reste, il est vrai, en dehors de la « Puissance du Canada », mais c’est une fort petite colonie, dont l’accession à la confédération est entravée surtout par sa détresse financière et l’obligation où se trouverait le gouvernement fédéral d’assumer une grande partie de la dette disproportionnée qui l’obère. Si les deux autres groupes coloniaux étaient aussi près de l’unité que l’est le groupe nord-américain, l’établissement de relations plus étroites avec la métropole serait grandement facilité.

La fédération australienne est depuis longtemps projetée. Jamais, semble-t-il, une terre n’a été mieux faite pour l’unité politique que « l’Île-Continent » des antipodes, comme l’appellent parfois ses habitans. Les conditions naturelles y sont d’une rare uniformité. La population y est presque absolument homogène, fait unique dans un pays de grande immigration ; et cependant cette contrée est divisée en six parties, — pour ne pas tenir compte en ce moment de la Nouvelle-Zélande, un peu différente des autres, — en six microcosmes politiques qui vivent aussi isolés que possible, se jalousent et cherchent trop souvent à se nuire réciproquement. Maintes fois des essais ont été tentés pour les