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LE DÉSASTRE


DERNIÈRE PARTIE[1]


I

Envoyés successivement au quartier du prince Frédéric-Charles, de Cissey et Changarnier en revenaient avec cet ultimatum : une capitulation pure et simple. Le général Jarras, délégué par le conseil malgré ses récriminations, allait arrêter avec le général de Stiehle les termes de la convention. À cinq heures, — nuit complète dehors, — le sauf-conduit arrivait. La pluie, jusque-là fine et persistante, devint diluvienne. Un ouragan épouvantable se levait. Le vent, avec un mugissement furieux, ébranla les toits. Projetée par une force terrible, l’eau fumante giclait en piques ; elle s’écrasait en cataractes. Dans le ciel noir, avec une violence toujours croissante, la lutte aveugle des élémens déchaînés tourbillonna.

Escorté du lieutenant-colonel Fay et du commandant Samuel, qui devaient lui servir de secrétaires, le général Jarras montait dans un vieil omnibus, attelé de deux rosses efflanquées. Dans la nuit, à travers les torrens d’eau que la tempête emportait par rafales. Du Breuil regarda l’humble véhicule s’ébranler. Le destin de l’armée, celui de la ville s’éloignaient du même pas, à la faveur des ténèbres. Il crut assister au louche départ d’un enterrement clandestin. Le ciel alors pleura de vraies larmes… De nouveau la pen-

  1. Voyez la Revue des 1er et 15 septembre et 1er et 15 octobre et 1er novembre.