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également utiles aux individus et aux nations dont ils font partie ; que cette énergie et cette initiative sont plus nécessaires : aujourd’hui que jamais en matière financière, commerciale et industrielle ; que, sur ce terrain comme sur les autres, ceux qui n’avancent pas reculent ; que nous sommes entourés d’une Angleterre qui déborde sur le monde, qui cherche à resserrer chaque jour les lions d’une fédération unissant la métropole à ses colonies, d’une Allemagne qui marche à pas de géant ; d’une Italie moins ruinée peut-être que nous ne nous le sommes un moment imaginé et dont l’industrie peut se développer. Il nous faut donc envisager, dans toute sa grandeur, l’effort économique qui s’impose à nous. Nous excellons dans un certain nombre de domaines. Même là, ne nous endormons pas dans la confiance d’une supériorité qui pourrait être battue en brèche sur plus d’un point. Justifions-la en nous perfectionnant chaque jour. Ailleurs, cherchons à imiter : nos rivaux en nous inspirant de leur ardeur, de leur persévérance, de leur audace même.

Car il faut avoir le courage de le dire : la nation hardie entre toutes, la France, qui a étonné le monde par la bravoure folle de ses soldats, de ses marins, de ses grands colons, paraît saisie de timidité en face des problèmes qui se posent aux sociétés modernes, timidité qui n’est certes pas le fait des individus : jamais elle n’a eu de plus courageux explorateurs qu’aujourd’hui, de ceux qu’un homme politique anglais admirait l’autre jour dans notre Ouest africain, en les appelant « fondateurs d’empires » ; jamais notre jeunesse ne s’est sentie aussi attirée vers les questions coloniales et les grandes affaires. Mais on dirait qu’un ensemble de causes mystérieuses empêchent toutes ces bonnes volontés, toutes ces énergies, de trouver leur emploi. Le plus impérieux de nos devoirs est de rechercher ce qui paralyse ces forces. L’étude des nations étrangères qui, moins bien douées que nous au point de vue des facultés intellectuelles, réussissent mieux dans leurs entreprises, s’impose donc : nous avons essayé de la commencer, en montrant à quels résultats la pesante Allemagne est arrivée sur le terrain financier.


RAPHAÊL-GEORGES LÉVY.