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et militaire, lui inspire des accens très significatifs. Après avoir lu le discours du trône : « Messieurs, a-t-il continué avec l’allure de l’improvisation, à ce que je viens de dire j’ajouterai encore ceci : il y a près de deux ans, j’ai juré à cette place même, sur le glorieux drapeau de mon premier régiment de gardes à pied, de maintenir ce qu’avait créé l’empereur Guillaume le Grand qui repose en Dieu, et de sauvegarder partout le prestige et l’honneur de l’empire. Vous avez assisté, le cœur ému et les yeux humides, à ce serment, et vous êtes devenus par là même mes cojurans. Je vous prie, en invoquant le nom du Dieu tout-puissant et la mémoire du grand empereur, de rester fidèles à ce serment et de m’assister pour maintenir fermement l’honneur de l’empire à l’étranger, pour lequel j’ai exposé, sans hésiter, la vie de mon frère unique. « Ce trait final donne le sens du discours. Le prince Henri est en effet sur le point de partir pour les mers de Chine, où il va commander l’escadre allemande. Sa vie ne semble pas très en danger, et il y a du mélodrame dans la manière dont Guillaume en a parlé ; mais il a voulu par là montrer quel intérêt s’attachait pour lui à une entreprise dont le succès ne saurait être acheté trop cher.

Il n’est pas vraisemblable que le prince Henri aille en Extrême-Orient pour rendre Kiao-Tcheou à la Chine ; un personnage aussi considérable n’aurait pas été nécessaire à cette tâche. Au reste, l’Empereur ne craint pas les complications ; sans les rechercher, il ne demande pas mieux que de donner à son peuple le sentiment qu’elles pourraient naître, et qu’il faut, sans plus tarder, se mettre en mesure d’y faire face. C’est pour cela qu’il a fait présenter par son gouvernement la loi sur le septennat maritime, imité du septennat militaire que M. de Bismarck, autrefois, a arraché par la force et l’intimidation au Reichstag et au pays. Le projet comporte la réalisation, en sept années, d’un plan considérable dont la dépense totale s’élèverait à 997 200 000 marks, soit près de 1 milliard 250 millions de francs. Cette somme serait répartie dans une proportion croissante entre les sept exercices à courir de 1897-1898 à 1904-1905. A peine a-t-il été connu que le projet a soulevé partout l’opposition la plus vive, et on a pu croire d’abord qu’il n’avait aucune chance d’être adopté. Ce n’est certainement pas la manière dont il a été défendu devant le Reichstag qui lui en a donné. Le prince Hohenlohe a fait un discours que sa voix faible a empêché d’entendre et qui, à la lecture, ne produit pas beaucoup plus d’effet. L’amiral Tirpitz, ministre de la marine, a fait une conférence qui a paru longue, et plus instructive que convaincante. Seul le nouveau