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Oui, bons paroissiens de cette pauvre église,
Robustes gens de mer vêtus d’un tricot brun,
Qui, baissant votre front boucané par l’embrun,
Portez, aux Fêtes-Dieu, le dais à plumes blanches,
Honnêtes marguilliers en blouse des dimanches,
Sachant par cœur l’office et chantant les répons,
Mamans avec un mioche ou deux près des jupons,
Aïeules dont les doigts ridés par la misère
Usent obstinément les grains durs d’un rosaire,
Jeunes femmes levant au ciel vos yeux songeurs,
Gamins du catéchisme et fillettes des Sœurs,
Vous qui priez ici Jésus, pendant les messes,
Pour devenir un jour dignes de ses promesses,
Soyez bénis ! C’est grâce à vous que j’ai dompté
Mon vieux reste d’orgueil et d’incrédulité.
Vos ancêtres et vous avez mis dans ces pierres
Un don surnaturel par vos saintes prières.
Sous cette voûte, à tous les angles du granit,
Divins oiseaux de l’âme, elles ont fait leur nid.
J’entends chanter en moi leur voix suave et pure ;
Mon cœur s’émeut enfin, ma bouche les murmure,
Et, tout en pleurs, tendant mes deux mains vers la croix,
J’ose dire : « Mon Dieu, je vous aime et je crois ! »


FRANCOIS COPPEE.