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À la vérité, c’est dans le liquide sanguin qu’on les a d’abord découverts, et c’est peut-être là qu’ils sont le plus abondans. Un physiologiste anglais, Hewson, les y avait déjà aperçus en 1770 ; mais ce n’est que cinquante ans plus tard que Johannes Millier, en Allemagne, les décrivit nettement. Leur étude s’est poursuivie lentement. On s’occupe encore aujourd’hui d’en distinguer les différentes variétés. Car le sang en contient plusieurs. La plus abondante, la mieux connue, celle à laquelle s’appliquent les détails que nous avons donnés et qu’il nous reste à compléter, sont les leucocytes polynucléaires neutrophiles. Ils sont colorés par les colorans neutres et possèdent un noyau en boudin enroulé. Les autres variétés, éosinophiles, lymphocytes, etc., sont peu mobiles, et moins encore phagocytes.

Le dénombrement de l’armée phagocytaire serait long à faire, les phagocytes sont nombreux dans le liquide sanguin. Un millimètre cube en contient environ 7 000 : mais ce nombre pâlit à côté de celui des globules rouges, 650 fois plus considérable. La lymphe, qui n’est en définitive qu’un sang dilué diversement et dépourvu de globules rouges, en contient aussi des légions innombrables. La liste ne s’arrête point là. Il y a, outre le sang et la lymphe, un tissu qui en renferme des quantités prodigieuses, c’est le tissu conjonctif, aussi universellement répandu que le sang et la lymphe elle-même. Dans ce tissu que l’on croyait être un simple feutrage de fibres, Virchow, l’éminent anatomo-pathologiste de Berlin, découvrit entre 1851 et 1858 des « cellules fixes » que l’on reconnut plus tard n’être autre chose que des leucocytes qui ont abandonné, pour un temps ou pour toujours, leur existence vagabonde ; et, en 1862, Recklinghausen saisissait dans cette même espèce de tissus, et pour ainsi dire en flagrant délit de migration, une seconde variété de cellules identiques aux globules blancs du sang. On les a appelées cellules migratrices du tissu conjonctif ; et c’est encore un nouveau nom qui vient allonger la synonymie de ces élémens et en masquer l’unité fondamentale. Enfin, depuis 1890, M. Ranvier, qui a eu une si grande part dans le développement de l’anatomie nouvelle a mis en évidence une troisième variété d’élémens cellulaires conjonctifs, les clasmalocytes qui sont des leucocytes géans, jusqu’à cent fois plus grands que les leucocytes ordinaires, et si nombreux que dans un millimètre cube de tissu conjonctif, chez les mammifères, on peut en trouver plusieurs centaines.