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Le 7 juin, MM. Chiché. Castelin, etc., entendaient faire décréter : 1° que, « si des présomptions sérieuses d’innocence s’élevaient en faveur d’un condamné, » le ministre de la Justice devrait saisir la Cour de cassation ; 2° que toute personne victime d’une arrestation, d’une poursuite judiciaire ou d’une condamnation reconnue erronée aurait droit à une indemnité égale au préjudice matériel et au préjudice moral dont elle aurait à se plaindre. Le 12 juin, quatrième proposition déposée par M. de Lacretelle, qui se bornait à réclamer l’allocation d’une pension viagère à Borras. M. Pourquery de Boisserin fit deux rapports sur ces quatre propositions réunies (26 juin 1890, 25 février 1892). Un projet de loi fut discuté, puis voté par la Chambre et transmis au Sénat le 8 avril 1892 : il modifiait le Code d’instruction criminelle sur trois points principaux : 1° les cas de révision cessaient d’être strictement déterminés ; 2° la demande en révision était recevable, même si la condamnation consistait en une simple amende ; 3° des dommages-intérêts devaient être accordés à la victime de l’erreur judiciaire reconnue, si elle les réclamait.

C’est alors que le gouvernement présenta, par l’organe de M. Ricard, ministre de la Justice, un projet de loi sur la révision des procès criminels ou correctionnels et sur les indemnités aux victimes d’erreurs judiciaires. La commission sénatoriale chargea M. Bérenger du rapport à faire sur ce projet et sur la proposition votée par la Chambre. Un nouveau texte fut adopté successivement par les deux branches du pouvoir législatif (2 mars 1894, 27 mai 1895), et devint la loi du 8 juin 1895.

En vertu de cette loi, la révision peut être demandée en matière criminelle ou correctionnelle[1], quelles que soient la juridiction qui ait statué et la peine qui ait été infligée, par conséquent alors même qu’une simple amende est prononcée. « Le souvenir de la flétrissure, même légère, a dit très bien M. Pourquery de Boisserin dans son rapport du 26 juin 1890, survit et suit une famille : la grâce, la réhabilitation, l’amnistie ne l’effacent pas. » C’est aussi notre avis. Il ne faut pas d’ailleurs laisser croire, même quand le délit est puni d’une peine pécuniaire, que, si la chose jugée tient debout, c’est parce qu’elle est légalement inattaquable.

  1. La révision n’existe donc pas en matière contraventionnelle, c’est-à-dire pour les infractions réprimées par des peines de simple police, qu’elles soient appliquées par le tribunal de simple police ou par le tribunal correctionnel.