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noter sur cette côte : la rade de Saint-Jean-de-Luz et le promontoire de Biarritz.

On sait que trois grandes routes traversaient, à l’époque romaine, la chaîne des Pyrénées : la première à son extrémité orientale, au col de Pertus, en face du cap de Creux, ad Pyrenæum ; ce fut celle qu’Hannibal prit pour passer d’Espagne en Gaule et qui ne devait être alors qu’un assez médiocre chemin frayé à l’usage des montagnards et de leurs chariots ; la seconde, à peu près centrale, allant de Saragosse à Oloron par le col Sainte-Christine, un peu au Sud-Est du pic du Midi, in summo Pyrenæo ; — la troisième, à l’extrémité occidentale de la chaîne, réunissant Pampelune à Dax, Aquæ Tarbellicæ, traversait le col depuis célèbre de Roncevaux, que l’on appelait aussi summum Pyrenæum et dévalait sur Saint-Jean-Pied-de-Port, imum Pyrenæum[1].

Mais un chemin à peu près littoral existait très certainement aussi en vue de la mer, desservant les principaux abris de la côte, et son tracé ne devait pas différer beaucoup de celui qui a été choisi, vingt siècles après, pour le chemin de fer de Saint-Sébastien à Bayonne. Ce chemin, qui a été longtemps un des plus fréquentés par les pèlerins se rendant à Saint-Jacques de Compostelle, longeait très vraisemblablement la rade de Saint-Jean-de-Luz, qui constitue un port de refuge naturel sinon parfait, du moins très précieux, sur une côte fort inhospitalière, où la violence de la mer est souvent redoutable ; et, bien que les itinéraires officiels et les géographes classiques ne fassent mention ni de la route, ni de la rade qu’elle contournait et qui ne présentait, à vrai dire, qu’une sécurité très relative, il est fort probable que la baie de Saint-Jean-de-Luz a dû recevoir bien des fois les barques des pêcheurs primitifs qui ont fréquenté ces parages aux temps les plus anciens ; bien souvent aussi les navires phéniciens, dont les voyages répétés de Tyr à Carthage, de Carthage à Gadès, de Gadès aux îles Cassitérides, avaient lieu toujours suivant le même itinéraire, sans trop s’écarter de la terre et en relâchant à peu près tous les soirs dans les havres naturels échelonnés sur leur route.

Historiquement, Saint-Jean-de-Luz ne date guère que du moyen âge. On le trouve mentionné sous le nom de Joaris sur un portulan du XVIe siècle ; ce nom, sans doute d’origine euskarienne, comme la plupart de ceux de la côte, ne nous apprend pas

  1. Cf. G. Parthey et M. Pinder, Itinerarium Antonini Augusti et Hierosolymitanum, Berlin, 1848.