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CÔTES ET PORTS FRANÇAIS DE L’OCÉAN

résineux, Boïos a eu de très bonne heure une réelle importance, et, dès le IIIe siècle, était siège d’un évêché. Vers le Ve siècle, il reçut la visite des Vandales, qui, pour l’anéantir, ne trouvèrent rien de mieux que de faire flamber la moitié du pays. Obligés de fuir devant les dunes que l’incendie avait rendues mobiles, les Boïens vinrent fonder une nouvelle bourgade au pied des monticules que l’on appela plus tard le « cap de Buch » et les « Dunes de l’Église. » Le nom de Boïens se transforma dans la suite en celui de « Bougés. » Les Bougés disparurent à leur tour, et le groupe des habitations du cap de Buch fut lui-même enseveli par les sables après une nouvelle destruction par le feu des forêts reconstituées. On le reconstruisit courageusement un peu plus à, l’Est, à peu près à l’endroit où se trouve aujourd’hui la Teste-de-Buch, au milieu de dunes qui, depuis près d’un siècle seulement, sont tout à fait fixées et régulièrement aménagées.

Au XIe siècle, le « captalat de Buch » jouissait d’une autorité souveraine sur tout le pays. Les seigneurs de Buch, — les « captaux, » comme on les appelait, — y exerçaient rigoureusement la haute et la basse justice avec une indépendance complète vis-à-vis de leurs souverains réguliers, les rois de France ou d’Angleterre, et frappaient en outre de droits énormes la pêche et la navigation : droits de « capte » sur le poisson, droits de « concage » sur le tonnage des bateaux étrangers, droits de balisage à l’entrée du bassin, droits d’ancrage pour le stationnement, droits de « pinasse » pour patente hebdomadaire, sans compter toutes sortes d’exactions, qui constituaient peut-être de plus gros bénéfices encore. Ces excès auraient fini par amener la ruine complète du pays, si les eaux qui baignent la côte landaise n’étaient pas les plus poissonneuses peut-être de l’Océan entre la Bretagne et l’Espagne[1].

La fortune, d’ailleurs, ne tarda pas à revenir sinon à la Teste-de-Buch, du moins à un petit hameau voisin, à peine naissant au commencement du siècle. À 34 kilomètres à l’Ouest de la Teste, quelques pauvres cabanes de pêcheurs barbotaient alors dans la vase molle et plate d’une assez triste plage, présentant cependant un très bon mouillage et qu’on désignait sous le nom d’Arcachon.

En quelques années, des plantations de pins merveilleuse-

  1. L’abbé Baurcin, Variétés bordelaises ou Essai historique et critique sur la topographie ancienne et moderne du diocèse de Bordeaux, 3 vol., 1786.