— Les enfans, interrompit vivement Nicole, font perdre beaucoup de temps en effet avec leurs jeux et leurs questions ; certaines femmes ont mieux à faire que d’être tout entières à ces petites choses.
— Je n’en sais vraiment rien, dit Marcelle évitant comme toujours de se mettre en scène ; la tâche obligatoire des femmes devrait peut-être se résumer ainsi : l’emploi intelligent de beaucoup de loisirs.
— C’est mon avis, acquiesça vivement Salvy.
— Encore faut-il qu’elles les aient ces loisirs, riposta Marcelle.
Mais Salvy couvrit cette réponse, qui n’était apparemment pas de son goût, en continuant :
— Je ne leur reconnais qu’une seule fonction, d’accord en cela avec un grand esprit dont l’arrêt, une bonne fois prononcé, restera : « La fécondité de plume empêche toujours plus ou moins d’être mère. »
Ce fut lancé si cruellement que Nicole ne put se contenir. Elle dit à Robert dans un aparté rapide :
— Certes il est impossible de suffire à tout, d’être père et mère à la fois ; c’est pourtant le lot de Marcelle.
Il avait donc deviné juste ; le problème qui l’avait tourmenté plus d’une fois se trouvait résolu. Tchelovek s’acquittait par devoir du labeur qui d’ordinaire dans la famille incombe à l’homme, tandis qu’auprès d’elle, impassible et hautain, son mari attendait l’inspiration rebelle. Trop heureux quand il ne la provoquait pas par des moyens auxquels Mme de Réthel, peu de temps après, fit étourdiment allusion devant Robert. Il s’agissait d’une perte au jeu, d’une perte relativement très forte, et la comtesse, née Helmann, en parlait aux habitués de son jour avec la rigueur d’une personne qui ne permet ces sortes d’incartades qu’au rang et à la richesse. Il semblait vraiment que Salvy eût empiété sur le domaine réservé à M. de Réthel !
— Ce qui ne fait, disait-elle, qu’alléger la bourse de certaines gens doit détruire l’équilibre d’un tout petit budget,… surtout quand la chose se renouvelle,… comme il paraît que c’est le cas pour Salvy. Mon mari me l’affirme !
— Et qui donc mieux que lui pourrait le savoir ? dit sournoisement Max Riehl. Mais, quant à moi, madame, je serai moins sévère que vous. Il faut bien permettre quelques dédommage-
