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que vous avez écrit à Bordeaux ;… l’enfant en a été touché, et, malgré la légèreté naturelle à son âge, je suis sûr qu’il n’oubliera jamais ce que votre séparation a eu de pénible pour son cœur. Jusqu’ici, tout va assez bien ; mais j’ai grand besoin de me confier à la miséricorde de Dieu pour ne pas envisager l’avenir avec crainte et inquiétude.


Le Dauphin prenait moins facilement son parti du nouvel état de choses :


Je vous regrette sincèrement tous les jours, écrivait-il le 28 décembre 1833, ainsi que le départ de ceux qui ont causé le vôtre[1], mais en vérité à l’âge de votre pupille, au moment du développement des passions, c’est un compliment à vous faire de la part de vos amis, de n’être plus chargé d’une telle responsabilité, surtout quand vous pouvez vous dire que ce n’est pas vous qui l’avez rejetée, et que c’est le parti de l’impiété qui a forcé de vous éloigner. Je jouis de penser que vous êtes réuni en ce moment à votre femme et à un de vos enfans. Je vous admirais vraiment de supporter depuis trois ans avec une telle égalité d’âme la séparation de tout ce qui vous était cher ; pour remplir un devoir.


Les lettres suivantes sont trop intéressantes à tous les points de vue pour n’être pas reproduites en entier :


LE DUC DE BLACAS AU BARON DE DAMAS

Prague, ce 13 novembre 1833.

J’ai reçu, mon cher baron, les deux petits mots que vous avez bien voulu m’écrire, et je me suis hâté de remettre vos lettres au Roi et à M. d’Hautpoul. M. le Duc de Bordeaux attendait de vos nouvelles avec empressement, il a été enchanté d’en recevoir, et il m’a aussitôt montré votre lettre, en me demandant s’il pouvait la faire lire au Roi et à Madame la Dauphine. Vous sentez bien que ma réponse a été affirmative, et j’ai joui pour vous de l’expression des sentimens de cet excellent petit prince. Mais, hélas ! que de sujets de réflexions ! que de craintes pour l’avenir ! j’en suis navré.

J’espère que M. de Montbel vous aura remis ma lettre, et que j’aurai encore de vos nouvelles de Vienne. Vous savez tout ce que j’aurais pu vous faire connaître, le Roi vous a écrit, et d’après ce que vous m’avez mandé de vos projets, sa lettre et celle-ci doivent vous trouver encore à Vienne.

Le prince de Metternich, qui est vraiment parfait pour le Roi, pour sa cause et pour ses fidèles serviteurs, vous aura dit, sans doute, que Mme la Duchesse de Berry demande à s’établir à Lintz, nous ignorons ce que l’empereur lui aura répondu ; il serait bien préférable qu’elle se fixe à Brünn ; le Roi trouve cependant que ces deux villes sont bien près de Prague.

Vous aurez vu passer à Vienne un détachement de la jeune France qui veut aller à Léoben[2], leur donnera-t-on les moyens de s’y rendre ? Il est

  1. Les PP. Déplace et Druilhet.
  2. Où se trouvait la Duchesse de Berry.