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jours il trouve des particules d’or à l’extrémité supérieure du morceau de plomb. Ces particules détachées du bloc solide du métal ont remonté, à travers la masse du plomb, jusqu’au haut du cylindre.

W. Spring a obtenu des effets analogues en pressant du cuivre contre de l’étain. De même encore, dans la fabrication de l’acier, les particules du charbon, primitivement appliquées à la surface, voyagent à travers le fer.

Cette faculté de déplacement moléculaire permet, à l’occasion, au métal, de modifier son état sur tel ou tel point. Ce qui est fort curieux c’est l’usage qui est fait de cette faculté dans certaines circonstances. Cet usage ressemble fort à l’adaptation d’un animal au milieu, ou aux procédés de défense qu’il emploie pour résister aux causes de destruction. M. Hartmann étire une barre d’acier ; un étranglement se manifeste en un point ; c’est là que la brisure se produira s’il continue ; mais il s’arrête, comme pour donner à l’être-métal le temps d’aviser. Lorsqu’il recommence après ce délai, la rupture n’a plus lieu : les molécules se sont empressées autour du point menacé, afin de consolider la partie faible et de la durcir. Au lieu d’une rupture au point primitivement étranglé, ce sera un étranglement qui se sera formé en un autre point.

Ce sont là des exemples de l’activité intestine qui règne à l’intérieur des corps bruts. De plus ces faits auxquels nous demandions seulement de réfuter l’assertion de Bichat relative à l’immuabilité des corps bruts, et de nous démontrer leur activité, nous apportent par surcroît une autre preuve. Ils montrent que cette activité est, comme celle des animaux, une riposte à une intervention étrangère et que cette riposte, encore comme chez les animaux, est adaptée à la défense et à la conservation de l’être brut.

S’il était utile de multiplier ces exemples, nous devrions citer, avec Ch. Guillaume, le cas fameux de la photographie des couleurs par le procédé de Becquerel. Voici une plaque grisâtre, au chlorure ou à l’iodure d’argent. Une lumière rouge la frappe : rapidement, elle devient rouge. On l’expose ensuite à la lumière verte ; après avoir passé par des teintes ternes et sales, elle devient verte. — Si l’on voulait expliquer ce remarquable phénomène, il n’y aurait pas de meilleur moyen que celui-ci : on dirait que le sel d’argent se défend contre la lumière qui menace son