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bloquaient Juliers ; la trêve de Hollande était expirée et les Pays-Bas demandaient des secours à la France ; l’occupation de la Valteline par les Espagnols s’éternisait. Ce ne sont pas là des questions que l’on règle par des phrases de Cour et par des propos de diplomate. Le Conseil dut donc en délibérer.

Sur l’avis de Richelieu, la Reine-Mère se prononça franchement contre le projet de reprendre les hostilités à l’intérieur. Le prince de Condé, au contraire, emporté par ses engagemens envers le parti catholique, fit décider que le Roi se mettrait de nouveau en personne à la tête de son armée pour en finir avec les protestans.

Le Roi quitta Paris, le 21 mars, jour de Pâques-Fleuries, presque à la dérobée, en costume de chasse, sans escorte et sans apprêt, « emporté par l’ardeur qu’avait Monsieur le Prince de voir les choses engagées. » La Reine-Mère se décida à l’accompagner. Quinze jours après, Louis XIII était à Nantes ; il marchait contre Soubise qui occupait l’île de Riéz. Étonné de cette marche rapide, Soubise essaya de se dérober, mais le Roi, s’avançant hardiment, quoique ses troupes fussent inférieures en nombre, l’accula à la mer et lui fit éprouver une sanglante défaite. La Reine-Mère tomba gravement malade, de fatigue et de dépit, à Nantes. Le Roi la laissa et, suivant la côte océane, marcha vers le Midi.

Partout, ses armes furent heureuses ; il prit Royan, laissa la Rochelle bloquée par une armée que commandait le comte de Soissons, fit capituler Sainte-Foy, où le vieux La Force vint à composition, ramassa, en passant, toutes les places de Sully dans le Quercy, prit, en huit jours, Négrepelisse, qui fut mise à sac, Saint-Antonin, où la lutte fut si terrible que les femmes mêmes y eurent part et que presque tous les défenseurs se firent tuer sur la muraille. Montauban avait réparé ses fortifications, muni sa garnison et comptait arrêter le Roi. On n’osa pas l’affronter. Par Toulouse, l’armée royale gagna Castelnaudary, Carcassonne, Narbonne, Béziers, et s’avança sur Montpellier, place importante qui commandait les communications entre le Languedoc, les Cévennes et le Dauphiné.

On était déjà vers la fin du mois d’août. Montpellier ne s’attendait pas à être attaquée ; sa muraille était « de papier » (Rohan). Mais la population était décidée à se défendre. Rohan fit faire, à la hâte, des fossés, des levées de terre et quelques fortifications, par un habile ingénieur, M. d’Argencourt. Le vieux