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en empêchant la ruine de bon nombre de colons, elle lui a rendu largement, sous une autre forme, un équivalent du sacrifice consenti. Il y a là, en matière de prêts à accorder aux indigènes, un enseignement qui ne doit pas être perdu ; responsable envers la commune ou le département, le douar ou la tribu peuvent bénéficier des avantages du crédit, sans les payer à un taux exorbitant, ni faire courir de risques graves à ceux qui se portent caution pour eux. On ne semble pas avoir jusqu’ici songé à tirer parti, sous ce rapport, de la forme de la propriété indigène, et cependant l’heureuse initiative d’un des trois conseils généraux mérite d’être méditée.


VII

Le voyageur qui, après avoir débarqué à Alger, parcourt les environs de cette ville et la plaine de la Mitidja ne peut retenir son admiration en présence du magnifique spectacle qui se déroule devant ses yeux. De tous côtés s’élèvent des villas, de coquets villages, de grandes fermes situées au milieu de champs cultivés, de plantations de vignes, d’orangers ou de citronniers. Tout y respire à la fois l’activité, le travail et l’aisance. Si l’on pénètre plus avant dans le pays, aux riches propriétés de la banlieue de Blidah succèdent les beaux vignobles de Miliana et de Médéa, les grandes exploitations de Marengo, et, du côté de la Kabylie, les vallées fertiles et peuplées de l’Isser et du Sebaou. Autour d’Oran, dès qu’on a passé la région assez aride qui entoure immédiatement la ville, il en est de même, sauf que la physionomie du pays est plus rude et moins riante. Tout autre est l’aspect de la province de Constantine, où la colonisation n’atteint qu’un développement beaucoup moindre, sauf autour de Bône, Philippeville, Guelma et aux environs de Constantine même. Les groupes de colons y sont rares et peu importans ; et cependant, tout semblait devoir attirer plus particulièrement vers cette région. Le sol, généralement plus fertile, la plus grande abondance des eaux pluviales, l’étendue des forêts, l’esprit moins remuant des indigènes, la superficie beaucoup plus considérable du Tell et des hauts plateaux, semblaient désigner cette province à l’effort de la colonisation.

Nous ne saurions ici retracer les phases de l’histoire de la colonisation en Algérie, les hésitations, les contradictions, les