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qualifiait les « orateurs » de « têtes folles. » Mais leurs mémoires successifs, et les doléances qu’ils prodiguaient dans les coulisses, eurent du moins cet effet, de rendre les questions d’Eglise importunes. Qu’on le voulût ou non, les débats ecclésiastiques rappelaient aux plénipotentiaires de Vienne une dette gênante, qu’ils étaient formellement décidés à ne point rembourser ; mais, lors même qu’un créancier est à l’avance éconduit, lors même qu’on s’arme contre lui du droit de la force, on éprouve toujours quelque ennui à voir et à entendre les avocats de la créance. Discuter sur l’Eglise d’Allemagne, c’était donner à ces trois « orateurs » l’occasion de placer leur mot : si peu dangereux qu’ils fussent, ils étaient impatientans, comme l’est toujours le bon droit auquel on ne veut ni ne peut satisfaire ; et, pour que le silence se fit sur les choses d’Eglise, on était tout prêt à renvoyer Wessenberg dos à dos avec eux.

Aussi Wessenberg borna-t-il bientôt son ambition à faire insérer, dans l’acte du Congrès de Vienne, un article, conçu en termes tout à fait généraux, qui énoncerait le principe d’une Eglise nationale allemande et garantirait par-là même à l’institution nouvelle l’appui protecteur de la Confédération germanique. Le cabinet de Berlin et celui de Vienne proposèrent chacun leur rédaction. Le texte élaboré par la diplomatie prussienne souhaitait que l’Eglise catholique en Allemagne reçût, « sous la garantie de la Confédération, une constitution (Verfassung) aussi homogène que possible, assurant ses droits et lui procurant les moyens les plus nécessaires pour faire prévaloir ses besoins. » Le texte autrichien stipulait que le règlement général des choses d’Eglise et des rapports des évêchés allemands avec la Cour de Rome demeurerait réservé à l’assemblée de la Confédération germanique. La Prusse, en somme, sans ambages ni scrupules, envisageait la possibilité d’une constitution, fabriquée en Allemagne, pour l’Eglise catholique d’Allemagne ; Metternich, qui avait le sens du catholicisme, proposait une rédaction moins choquante pour Rome. Sous l’action de Wessenberg et du comte de Munster, ministre de Hanovre, les deux puissances finirent par tomber d’accord sur un texte commun, qui n’était que le projet prussien légèrement modifié.

Wessenberg se croyait maître du succès, lorsque survint, pour traverser son espoir, la mauvaise volonté de la Bavière, bientôt suivie d’autres oppositions. Les partisans des Eglises d’Etat