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singuliers, la plupart récens, et tous, ou à peu près, accompagnés d’attestations formelles, de contre-expertises, d’un tel cortège de preuves que l’on souhaiterait aux événemens historiques les mieux reconnus de réunir autant de titres à notre confiance. Ce qui ne signifie point, d’ailleurs, que quelques-uns des faits rapportés par Myers ne puissent pas avoir été inexactement observés, ou encore avoir été interprétés avec le parti pris d’y voir un élément de surnaturel. Il y a là telle prévision qui peut bien n’avoir été qu’une coïncidence, telle apparition dont le « percevant » s’est probablement ensuite exagéré la netteté, dans son désir d’en faire un message « télépathique. » Oui, pour dûment vérifiés que soient tous ces faits, on est en droit de supposer qu’une bonne moitié d’entre eux n’ont pas eu le caractère anormal que leur ont attribué leurs premiers témoins ; mais c’est à la condition d’admettre que l’autre moitié a eu, incontestablement, ce caractère ; sans compter que Myers n’a recueilli dans son livre qu’une petite partie des phénomènes divers qu’il a eu l’occasion d’étudier, et que, de la même façon, parmi ces autres faits que, faute de place, il ne cite pas, — se bornant à nous indiquer les endroits où nous pourrons en trouver le récit, — quelques-uns tout au moins doivent se trouver dont le témoin le plus sceptique ne saurait contester la réalité.

Lorsque, par exemple, vingt personnes nous affirment qu’elles ont vu apparaître devant elles un parent ou un ami qui, vers le même temps, mourait ou était en danger de mort à l’autre bout du monde ; lorsque nous apprenons que ces personnes ont fait part aussitôt de leur vision à leur entourage, qu’elles l’ont notée, ce même jour, dans leur agenda ; que non seulement elles ont vu une image confuse de l’ami lointain, mais qu’elles ont encore remarqué et noté un vêtement qu’elles ne lui connaissaient pas, une égratignure sur le front, tel détail dont on découvre plus tard qu’en effet il a existé chez l’ami en question ; lorsque tout cela nous est certifié par des hommes d’une honorabilité incontestable, et des savans, et des sceptiques, qui nous avouent que jamais, ni avant, ni après, aucun autre fait du même genre n’est parvenu à leur connaissance, force nous est de supposer que la moitié au moins de ces faits ont grande chance d’avoir eu lieu vraiment, tels qu’on nous les rapporte, d’avoir contenu en eux quelque-chose de plus qu’une illusion ou un simple hasard. Et qu’on ne s’imagine point que tous les faits cités par Myers consistent en des apparitions de morts ou de mourans ! A chaque degré, pour ainsi dire, de son analyse psychologique de la personnalité humaine, l’auteur anglais nous offre toute une série de faits à la fois étranges et certains :