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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 18.djvu/334

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pour leur part la neutralité perpétuelle du Danemark. Dans le cas d’une guerre entre les nations étrangères, le Danemark n’aurait aucun besoin de déclarer solennellement sa neutralité et d’exiger des navires qui passeront le Sund qu’ils respectent sa neutralité perpétuelle. Toutes les nations sauraient d’avance que ce petit pays n’a rien à faire avec les complications internationales qui troubleraient la paix du monde. Toute accusation ou seulement tout soupçon de vouloir intervenir dans les combinaisons des puissances en conflit s’écrouleraient d’eux-mêmes ; et, d’un mot, la neutralisation du Danemark serait sa défense et son refuge

À ce propos, nous avons plaisir à citer les paroles par lesquelles un patriote belge, M. Lehon, expliquait au Congrès national de Bruxelles, en 1831, les avantages de la neutralité perpétuelle de la Belgique.

« Appliqué à la Belgique, disait-il, ce système tend plutôt à la préserver de la convoitise des grandes puissances qu’à la restreindre dans ses droits : sa défense contre toute agression reste entière ; elle jouit de l’avantage de ne pouvoir être entraînée dans une guerre étrangère ; elle possède un moyen de résistance aux exigences des grands États ; elle peut affecter une plus grande somme de ses ressources à tous les genres d’amélioration et de prospérité intérieure. Du reste, libre dans ses relations de commerce, même en temps de guerre, elle est inviolable dans son territoire et attire l’étranger par ses garanties de sécurité. Si la neutralité est impuissante, comme tout autre traité, en cas de conflagration générale, elle est protectrice dans les autres cas d’invasion ou de guerre ; et comment méconnaître ce qu’elle a de tutélaire pour nos provinces au seul souvenir de notre histoire[1] ?… »

Les mêmes considérations, appliquées au Danemark, établiraient suffisamment tous les avantages qui découleraient de sa neutralité. La garantie conventionnelle, donnée à la Belgique par les grandes puissances, n’ajouta que très peu à sa position privilégiée et enviable. Néanmoins, les partisans de l’opinion régnante, que c’est seulement en vertu d’une sorte de donation de la part des grandes puissances que la neutralisation d’un petit État pourrait être déclarée, se plaisent à affirmer qu’une

  1. Voyez Descamps, La neutralité de la Belgique (Bruxelles, 1901), p. 201.