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comme points d’appui. Tous les coolies de la colonne, dont la plupart proviennent de volontaires recrutés à Tong-Tchéou, sous la direction de quelques soldats, sont aussitôt employés à abattre les sorghos au moyen de leurs « coupe-coupe, » pour créer un champ de tir en avant. En même temps, rapidement, les troupes prennent leurs positions de combat. À ce moment, quelques lanciers du Bengale, sans doute égarés à la suite de l’escarmouche, se rabattant, au galop, à travers les sorghos, passent à quelques centaines de mètres de la fraction postée à l’aile gauche de la ligne, qui, croyant avoir affaire à des Chinois, s’apprête à les accueillir à coups de fusil. Grâce au sang-froid des chefs, une fâcheuse méprise est évitée à temps. Quelques-uns des coolies, pressentant du danger, profitent de l’incident pour s’enfuir.

Vers sept heures trente, le général est informé que les quelques Boxers qui se trouvaient près du barrage et qui avaient sans doute pour mission de signaler, par les coups de feu qui avaient été entendus, l’approche des Alliés, ont disparu ; et que la section d’éclaireurs occupe le débouché ouest du village. Il envoie aussitôt son officier d’ordonnance, le capitaine Bobo, en arrière, auprès du général américain, pour l’informer de la situation et lui faire savoir, notamment, que l’incident qui vient d’avoir lieu se réduit à une escarmouche sans importance ; enfin, qu’il va aller occuper le village du barrage.

Cet officier trouve le général Chaffee au bivouac, au milieu des troupes américaines qui faisaient leurs préparatifs de départ. « Répétez à votre général, lui répondit-il, que les Russes sont à trois kilomètres en arrière de nous, sur l’autre rive du canal, et que sa colonne est en ce moment très en l’air, très exposée. » Vers huit heures, au moment où la petite colonne française allait se remettre en mouvement, le général Chaffee, avec un nombreux état-major et toute sa cavalerie, rejoint la colonne française et demande au général Frey à la dépasser pour se porter au secours de sa cavalerie ; la plus grande partie de son infanterie le suit, à une vive allure, à cinq ou six cents mètres en arrière. Le général français, qui lui avait déjà fait connaître que l’escarmouche était terminée, lui répond que, par suite de la disposition de ses troupes, la route était libre et qu’il lui était loisible de le dépasser. Pendant une petite halte de la colonne française, effectuée à proximité du barrage, une fraction du