Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 19.djvu/335

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bougies sont cotées 4 livres, le thé 6 livres, le service 9 livres. Comme il faut doubler les chiffres du Consulat pour avoir leur équivalence en 1904, ils se trouvent supérieurs à ceux qu’un hôtelier de province réclamerait aujourd’hui.

A Paris, les cinq étrangers et leur suite descendent dans un hôtel de la rue Richelieu, où leur appartement coûte 480 francs de notre monnaie par semaine ; moyennant pareille somme, il leur est fourni deux repas « appétissans et variés. » Ils prennent à leur service un « laquais de place » à 8 francs par jour et la location d’un carrosse de remise leur revient à 1 300 francs par mois.


II

Il ne suffirait pas, pour apprécier ces chiffres, de les rapprocher du tarif des hôtels dans le Paris contemporain. Il faudrait aussi comparer les logis qui passaient, en 1802, pour des hôtels de premier ordre, avec les édifices qui, de nos jours, ont pris leur place.

Comparaison difficile ; autrefois les exigences des hôteliers variaient suivant le rang des cliens. Chacun connaît la réponse faite au roi George d’Angleterre par l’aubergiste de Hollande qui lui comptait 50 florins pour 3 œufs. « Les œufs sont donc bien rares ici ! fait observer le prince. — Non, les œufs n’y sont pas rares, lui est-il répliqué, mais ce sont les rois qui n’y sont pas communs. » L’hospitalité de nos luxueux palais, de nos confortables casernes à voyageurs est marquée en chiffres connus ; mais la splendeur et les agrémens que l’on y rencontre n’avaient point d’analogues dans les meilleures maisons d’il y a un siècle, et celles même qui, parmi les plus anciennes, ont subsisté, ne conservent que leur enseigne. Leur intérieur s’est totalement transformé.

« L’hôtel Meurice, dit un Guide de 1830, est le plus recommandable de Paris parce que le propriétaire y parle anglais. » Il n’était pas seul dans ce cas, sans doute, puisqu’en 1816 s’était fondée, place Vendôme, une hôtellerie à laquelle le marquis de Bristol avait donné son nom, et dont la clientèle se recrutait, en majeure partie, dans l’aristocratie britannique. Cet hôtel, fréquenté par les familles régnantes d’Europe, n’était pas difficile à remplir. Maintenant que sa superficie a doublé par l’acquisition d’un immeuble contigu, il ne compte que 25 appartemens,