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« Art. 53. — La marche se poursuit ainsi, jusqu’à distance d’assaut, et à ce moment les troupes de choc doivent être arrivées à 200-300 mètres de la chaîne. Leur chef fait alors battre la charge, qui est, pour la chaîne, le signal du feu à répétition et pour les troupes de choc, celui de la marche ininterrompue à l’adversaire. »

Et plus loin, Titre VII. art. 16 : « Lorsque la préparation est jugée suffisante par le général de division, les troupes de choc s’ébranlent sur son ordre, irrévocablement et sans arrière-pensée, n’ayant qu’un but, celui d’aborder coûte que coûte l’adversaire...

« La formation de ces troupes doit être mobile et aussi peu vulnérable que possible ; elles peuvent être disposées en lignes minces successives, en lignes de colonnes de compagnie, en lignes de sections par quatre... etc. ; » puis : « La chaîne exécute le feu à répétition ; les colonnes d’assaut la rejoignent, l’entraînent en avant, chacun n’ayant plus qu’une pensée : marcher sur la fraction qui précède et la pousser quand même vers l’ennemi. »

Sans doute on va objecter que le règlement de 1901 laisse au commandement toute latitude pour faire prendre aux troupes de choc des formations « aussi mobiles et aussi peu vulnérables que possible. » Il n’en reste pas moins établi qu’il préconise la réunion, en masses, de troupes disposées en profondeur pour former les colonnes d’assaut.

Dès lors se pose cette question : Qui est dans le vrai ? Est-ce le règlement de 1875 ou celui de 1901 ?

Depuis 1870, les armes ont-elles donc diminué de puissance ? Comment se fait-il que le règlement de 1901 ordonne d’exécuter, aujourd’hui, ce qui était déjà reconnu impossible il y a trente ans ?

On peut à bon droit s’étonner d’une telle contradiction et d’un tel retour aux procédés irrévocablement condamnés.

Pour l’expliquer, il faut d’abord se rappeler que la routine est coutumière de ce phénomène de régression inconnu de la nature.

Les professeurs le représentent comme un retour aux saines traditions et l’histoire docile fournit les exemples dont ils peuvent avoir besoin pour défendre leur thèse. Il n’est pas de campagne ou de bataille dont un chercheur ne puisse faire sortir la démonstration de ce qu’il veut prouver.

Pour se rendre compte de la manière dont ce changement