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LORENZACCIO


Lorenzaccio, par M. Pierre Gauthiez, 1 vol. in-8o. A. Fontemoing, 1904.


Un vieux chroniqueur bourguignon, Loys Gollut, intitulait ainsi un chapitre de ses Mémoires : « Fautes superbes de Iean de Chalon, et le chastoy qui en fut faict, » et un chapitre suivant : « Les occupations, complexions, forme, maryage, enfans et amours du duc Iean. » Un titre analogue conviendrait à cette étude ; il en définirait le développement et la portée avec une grâce archaïque tout à fait seyante. Il n’y a presque pas une action, un caractère, un trait du personnage équivoque de Lorenzino de Médicis, — ou Lorenzaccio, au péjoratif, — qui ne nous intéresse en particulier, nous Français. Papes, princes alliés de nos rois, Mécènes protecteurs des lettres et des arts, tous les membres de son exécrable et illustre famille sont intervenus plus ou moins dans nos affaires et ont influencé notre formation intellectuelle et morale : la maison des Médicis et celle de France ont aussi mêlé leur sang. Etudier le naturel du plus singulier de ces Italiens, c’est nous permettre d’apprécier mieux la qualité de leur riche apport à notre patrimoine. Aussi bien Lorenzaccio est-il notre homme non seulement comme Médicis, mais comme individu. Il a agi, en sens divers, plusieurs fois sur nous depuis un siècle. Le meurtre, par ses mains, de son cousin Alexandre, duc de Florence, lui a conféré le prestige d’un modèle des régicides. Son crime est le sujet d’un drame inédit de George Sand ; il est le sujet d’un drame fameux d’Alfred de Musset, tout récemment mis à la scène, et qu’on lira aussi longtemps dans notre patrie qu’elle sera le laboratoire des expériences révolutionnaires. L’œuvre est belle en effet, retentissante, de toutes