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Quand soudain un vol blanc de rapides mouettes,
Rasant les rayons d’or de l’onde qui les fouette,
Fuyant, mit un frisson de neige sur la mer !


CHANT


Je vais, tel que le papillon,
Et sur chaque fleur je me pose,
J’aime le zéphyr et la rose,
Les parfums égarés et le pâle rayon,

La terre chaude du sillon,
Et le ciel, joyeux ou morose ;
La rosée en larmes m’arrose,
J’aime entendre au soleil murmurer le grillon.

Quand l’orage embaumé de verdure et de sève
Fait trembler de sa voix les échos infinis,
Sur l’herbe aux doux reflets je laisse errer mon rêve…

Et mon cœur est bercé par la voix de tes nids,
Bocage transparent où luit un soleil pâle
Dans un vague parfum de feuille et de pétale.


LES HEURES ÉCOULÉES


Au léger tintement de la cloche, le soir,
A l’heure où les troupeaux blanchissent les vallées,
Quand, sous l’aile fragile et verte des feuillées,
Dans un dernier rayon rêve le vieux manoir,
Alors je me souviens des heures écoulées.

Fraîches, elles s’en vont, en écharpes d’azur,
Me frôlent en passant de leurs têtes voilées,
Sous les pales arceaux des profondes vallées…
Quand l’ombre du couchant rougit sur le vieux mur,
Alors j’aime sourire aux heures écoulées.

Quand l’aube met sa rose aux pentes du gazon,
Et quand le vent se brise aux vagues étoilées,
Et trouble les cheveux des branches ciselées
Alors j’aime, au frisson doré de l’horizon,
Suivre le pâle essaim des heures écoulées.