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de disqualifier, au préjudice des intérêts français, le représentant de la France à l’Exposition internationale de Saint-Louis. » Si ce texte est voté, que deviendra M. Combes ? Il est personnellement accusé d’avoir commis une imprudence, et risqué de compromettre par la des intérêts nationaux. Les ministériels protestent contre cette accusation, mais ne l’ont-ils pas lancée les premiers contre M. le président du Conseil ? Il fallait les entendre le lendemain de la séance du 10 juin ! Ils dénonçaient, avec amertume, avec douleur, avec colère, la maladresse de M. Combes. On leur propose aujourd’hui de la constater parlementairement : ils se dérobent en poussant des cris de rage contre la Commission. En quoi celle-ci est-elle coupable ? N’ayant pas trouvé la preuve de la tentative de corruption dont M. Combes a cru avoir triomphé, ne devait-elle pas le dire ? Elle l’a dit, et naturellement elle s’est livrée à ce sujet à quelques réflexions. D’après elle, le propos de M. Chabert rapporté par M. Lagrave à M. Edgar Combes, — à savoir que les Chartreux seraient très « malins » s’ils versaient quelques millions dans une caisse honorée des sympathies du gouvernement, — ce propos n’avait pas l’importance qui lui a été prêtée par la suite, et ne constituait nullement une tentative de corruption. Remontant aux origines de l’affaire, M. Colin défend M. Millerand d’avoir invoqué un « intérêt supérieur » pour fermer la bouche de M. Combes sur le nom de M. Chabert. M. Millerand ne s’est jamais servi de cette expression : elle a été inventée après coup par M. Combes. M. Millerand n’avait parlé que du devoir de discrétion qui s’impose à tout gouvernement au sujet des donateurs généreux qui ont mis de l’argent à sa disposition, ou à celle d’un comité à ses ordres. Et, d’ailleurs, pourquoi livrer le nom de M. Chabert ? Pour apporter à M. Edgar Combes ce qu’on appelle un « témoignage de moralité » dont il n’avait pas besoin ? Il y a, en tout cela, quelque « puérilité : » c’est le mot du rapport. M. Colin hausse les épaules devant ce lourd échafaudage qui ne peut servir à rien en ce qui concerne M. Edgar Combes, mais qui a eu, en fin de compte, pour inconvénient de peser lourdement, bien qu’à faux, sur M. Lagrave. Tel est l’avis de la Commission d’enquête : nous le donnons tel quel. La Commission, qui a vu les uns en face des autres M. Lagrave et MM. Combes père et fils, qui a assisté aux scènes orageuses et dramatiques provoquées par les démentis que ces trois hommes se sont infligés, qui a pu enfin juger de leur sincérité par leurs attitudes, la Commission prend parti pour M. Lagrave et contre MM. Combes. Il est démontré pour elle que M. Lagrave a dit la vérité. En d’autres temps, une pareille constatation