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de la porcelaine, et l’importance des ateliers qui donnent à la ville sa population et sa richesse font de Limoges une cité ouvrière. Ces travailleurs étaient sous l’influence de la société internationale, le conseil municipal était leur élu. Ses propres passions et celles de la foule éclatent ensemble : le 4 septembre, il saisit tous les pouvoirs. Trois de ses membres sont délégués à la mairie, cinq à la préfecture. Ces cinq désignent aussitôt le préfet qu’ils veulent, et, symbole de la facilité avec laquelle ce parti parle au nom du peuple, le délégué qui notifie ce vœu à Paris signe « pour le Conseil municipal tout entier » et, en proposant le candidat, le déclare attendu par « l’unanimité de la population[1] » Ce candidat, Georges Perrin, est un journaliste qui a quelque temps rédigé à Limoges le Libéral du Centre et qui a grossi à Paris le groupe des jeunes « irréconciliables. » Le gouvernement, trop heureux que là, comme à Saint-Etienne, une population socialiste se contente d’un préfet ardemment ré publicain, nomme le jour même préfet Georges Perrin, qui obéira à la ville et fera obéir les campagnes.

Agricole comme le Limousin, et sans grandes villes, la Dordogne a toutes les raisons d’être paisible, et le serait partout, si elle ne formait les confins où la moyenne France touche la France méridionale et où commence une autre race. Périgueux avait, aux élections du 10 août, nommé une municipalité d’opposans, et, sans s’arrêter à la fadeur des nuances moyennes, s’était ralliée aux couleurs violentes. Le premier élu avait été le docteur Gilbert, partisan et ami de Rochefort. La même fortune qui, le 4 septembre, a porté le pamphlétaire au gouvernement porte, dès le 5, le médecin à la préfecture de la Dordogne. La première dépêche du nouvel administrateur est pour envoyer « une poignée de main » au nouveau maître de la France, puis il résume sa politique par ces mots au ministre de l’Intérieur : « Ne faites rien dans la Dordogne sans consulter Rochefort[2]. » Il semble qu’il ait dès le début poussé l’audace des opinions assez loin pour être en avant des plus purs. Mais qui jamais fut pardonné par ses rivaux de leur prendre leur place, même en y portant leurs idées ? Or, à Périgueux, un ancien représentant de 1848, le « citoyen » Chavoix, s’est mis par dépêche à la disposition du

  1. . Id., 1428-1429.
  2. Id., 951.