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LA
MUSIQUE D’ÉGLISE AU THÉÂTRE

Ce sujet n’est que la réciproque et comme l’envers d’un autre, plus considérable, plus actuel, que nous avons abordé, pour ne pas dire attaqué déjà maintes fois, et qui s’énoncerait en termes contraires : La musique de théâtre à l’église. Le contre-sujet aurait, disons-nous, plus d’actualité, puisque la question de la musique liturgique vient d’être à nouveau posée et résolue par une volonté suprême, chez nous, hélas ! encore mal comprise et plus mal obéie. Il serait aussi plus étendu, l’église faisant au théâtre, chez elle, une place que sur le théâtre même elle n’a jamais occupée. Mais on sait, — les instructions pontificales en témoignèrent hautement, — que l’église aujourd’hui ne craint pas d’imiter le théâtre. On sait peut-être moins bien que le théâtre, toutes les fois qu’il a figuré des sujets ou des actions religieuses, n’a rien négligé pour ressembler à l’église. Il en a pris le ton ou le style avec autant de goût que de respect. Ainsi, par un échange ou plutôt par un renversement bizarre et fâcheux, la musique d’église au théâtre est d’église plus qu’à l’église même. Sous l’apparence d’un paradoxe, cela n’est qu’une vérité de fait ou d’histoire ; et c’est cela que nous voudrions, non pas en théorie, mais en fait et par l’histoire également, essayer d’établir ou de rappeler.

La reproduction dramatique et musicale d’offices ou de cérémonies religieuses — j’entends celles de notre religion — n’est pas fort ancienne. Je ne sache pas que les deux premiers siècles de l’opéra, qui sont le XVIIe et le XVIIIe, s’en soient avisés. En Italie d’abord, puis en France et en Allemagne, nous voyons alors la tragédie musicale s’inspirer de l’antiquité seule et ne chercher ses héros que parmi les