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développement pris par la marine marchande dans ces dernières années a quelque peu amélioré les conditions de recrutement des marins de commerce. Les Compagnies de navigation ont fait quelquefois des efforts louables pour faciliter l’apprentissage maritime aux jeunes gens désireux de se vouer à la carrière de marin. Par exemple, la Flotte volontaire a admis sur ses navires des élèves, auxquels elle a fait faire le temps de navigation qu’exigeait l’État pour l’admission de ces jeunes gens dans ses écoles. Elle obtint même du ministère des Finances une subvention pour l’entretien des élèves accueillis sur ses navires.

De son côté, le gouvernement a fondé des écoles destinées à former des marins et des officiers pour la marine de commerce. Il existait ainsi, en 1900, 35 de ces écoles, dites « classes de navigation, » et divisées en trois catégories ou « degrés : » celles du premier degré formant des capitaines au long cours ; celles du second degré, des capitaines au cabotage, ou des pilotes au long cours ; celles du troisième degré, des pilotes au cabotage. Il a été fondé, en outre, à l’Ecole de commerce d’Odessa et à l’École de navigation marchande d’Arkhangelsk, des cours destinés à former des capitaines marchands, et dont la durée est de trois années. A Arkhangelsk même et à Kemur, fonctionnent encore deux autres classes, dont les cours ont lieu pendant les mois d’hiver et durent deux années.

Les résultats et l’organisation même de cet enseignement technique sont vivement critiqués par les Russes. D’après une revue qui puise ses inspirations à bonne source[1], la division de l’enseignement en trois degrés serait « absurde, » parce qu’elle entraîne l’interruption des études, en forçant les élèves à naviguer dans l’intervalle. La génération sortie de ces écoles serait dépourvue de valeur et de capacité véritables, au point de vue professionnel. Sans vocation pour le métier de marin, les élèves y sont admis pourvu qu’ils sachent lire, écrire et faire les quatre premières opérations d’arithmétique. On est obligé de les en laisser sortir, sans qu’ils emportent de connaissances réelles, parce qu’il est impossible de les retenir plus longtemps, et que leur refuser le diplôme équivaudrait, d’autre part, à fermer les écoles. Ce n’est donc pas de l’enseignement technique, tel qu’il est actuellement organisé, qu’il faut attendre une éducation

  1. La mer et la vie maritime, fondée et rédigée sous la haute direction de S. A. I. le grand-duc Alexandre Mikhailovitch.