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importans de ces faits se résument ainsi : 1° le dégagement d’électricité se fait aux électrodes seulement, aux deux bouts de la cuve ; 2° le transport d’électricité se fait, d’un certain train, à travers la solution. Faraday le manifestait en mettant la solution dans un tube assez long pour pouvoir observer l’influence de ce courant de convection sur l’aiguille aimantée ; 3° les produits de l’électrolyse apparais- sent au même instant aux deux électrodes.


Ces idées de Grotthus sur la décomposition ou dissociation des molécules en ions dans les solutions que le courant électrique peut traverser, ont subsisté depuis un siècle. Faraday, en 1835, les a adoptées ; la plupart des physiciens ont fait de même. On a continué à les enseigner avec plus ou moins de soin ou de négligence. Cependant elles présentaient un certain nombre de lacunes importantes. Clausius en 1857 et Arrhenius en 1886 en ont comblé les principales. Ils se sont préoccupés en particulier de la question de savoir si la dissociation partielle en ions est seulement l’effet du courant, ou si au contraire elle ne peut en être indépendante, le précéder et lui survivre. Est-ce seulement pendant le passage de l’électricité et du fait de ce passage que la substance dissoute dans l’eau, sel, acide, base, — subit ce clivage moléculaire si singulier et si remarquable ?

C’est la réponse à cette question qui a donné à la théorie des ions sa physionomie actuelle. En affirmant que l’ionisation se produit sous d’autres causes que le passage du courant électrique, et par exemple par le seul fait de la dissolution de l’électrolyte dans l’eau ; que les solutions aqueuses de sels quelconques, d’acides minéraux et de bases minérales sont plus ou moins ionisées, Arrhenius et l’école physico-chimique allemande, Ostwald, Nernst et leurs élèves ont rattaché à la théorie de l’ionisation un grand nombre de problèmes de chimie et de chimie biologique et particulièrement celui qui nous occupe, de l’acidité et de la basicité des corps composés.


III

La théorie de Grotthus supposait que c’est le courant électrique seul qui disloque la molécule du sel en ses deux ions par suite d’une véritable décomposition chimique, en triomphant de la force qui les unit. S’il en est ainsi, une partie de l’énergie électrique devrait être employée à cette séparation (énergie d’ionisation). Il faut, pour que l’action commence, que les quantités d’électricité accumulées aux