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Dans l’Histoire contemporaine par l’image[1], c’est l’évocation, dans son mouvement général, de tout un siècle de notre existence nationale, la résurrection de tout ce qui en a marqué les heures brillantes ou mélancoliques, tristes ou glorieuses, qui surgit, à la lueur d’une flamme vivifiante, de cendres presque éteintes et, pour un moment, ranimées. Les grands faits de notre histoire moderne, toutes les manifestations de la vie sociale y apparaissent dans les détails les plus saisissans, sous les aspects les plus pittoresques, en une suite de scènes de mœurs et de tableaux historiques, qui commencent au début même de la Révolution, et dont la théorie se poursuit et se déroule, dans une succession d’images chronologiquement disposées, jusqu’à la fin du siège de Paris et la défaite de la Commune, toutes communiquant à chacune des pages une sorte de frémissement de vie et laissant une impression si forte sur l’esprit, que le souvenir des événemens qu’elles traduisent doit rester à jamais gravé dans la mémoire. 1789-18721 entre ces deux dates fatidiques et sinistres, que ne s’est-il point passé, et de quels spectacles la France n’a-t-elle point été témoin ? Sunt lacrymæ rerum, c’est la réflexion qui s’impose en fermant ces annales d’un siècle qui vit tant de bouleversemens, tant de révolutions, de changemens de régimes et de gouvernemens, de guerres étrangères et fratricides, d’un siècle que la Mort ouvre, domine et ferme du tranchant de sa faux.

Après les scènes vécues, les travers de notre temps. S’il est vrai que la caricature n’ait jamais pu convenir aux idéalistes, celles de Puvis de Chavannes[2]ne devaient pas faire exception ; et c’est bien ce que l’on constate en parcourant les croquis que le peintre de Ludus pro patria, du Bois Sacré cher aux Arts et aux Muses, de la Légende de sainte Geneviève, de l’Inspiration chrétienne, de Doux Pays, ne destinait pas sans doute à la publicité, mais qui sont curieux en ce qu’ils montrent ce qu’un artiste épris de la beauté, peut faire dans le domaine comique, dans le genre le plus opposé à la nature même de son génie, fait de simplicité et de noblesse, de pureté et d’harmonie. En sens, les caricatures d’une psychologie peu compliquée réunies dans cet album, où la verve burlesque, l’imagination excentrique, fantastique et fabuleuse, inventent des mascarades monstrueuses ou tragique qui font penser à Gallot, à Edgar Poë, à Flaubert et à Victor Hugo, sont Intéressantes à connaître. Et puis ne trouve-t-on pas, çà et là, quelques traits de génie qui rappellent le maître dans ces fantaisies imaginées par délassement et qui sentent la

  1. Flammarion.
  2. Delagrave.