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qui, passés avec succès, procurent un certificat d’études primaires agricoles pour le premier degré, et un diplôme pour le second degré ; ce diplôme donne le droit de prendre part à un concours pour l’obtention d’une demi-bourse dans l’une des écoles pratiques d’agriculture de la région.

En 1901, les jurys de l’Union faisaient passer 2 244 examens, 1 854 en 1902, 1 292 en 1903. Dans la plupart des départemens, les instituteurs de l’État reçurent l’ordre de ne pas envoyer leurs élèves devant ces jurys ; presque seules les écoles libres fournissaient le contingent, et leur fermeture va sans doute porter un coup terrible à cet enseignement agricole qu’il avait fallu créer de toutes pièces, et qui donnait déjà d’excellens résultats. Cependant le nombre des candidats aux examens agricoles du 1er et du 2e degré a été de 873 et de 301 en 1905 : la charité, l’amour du bien public, semblent devoir ici réaliser des miracles : « Il y aurait, dit un moraliste, de quoi faire bien des heureux avec tout le bonheur qui se perd dans ce monde ; » et aussi, peut-on ajouter, avec l’abnégation, le courage, le talent qui se perdent. Eh bien ! ils trouvent ici leur emploi ; les hommes fléchissent trop souvent, les femmes sont entrées en scène, et leur effort, pour n’être pas toujours dirigé avec l’ordre, la méthode et le sentiment du possible, n’a pas été stérile. Dans le Beaujolais et ailleurs, des femmes d’élite ont organisé des ouvroirs où elles enseignent la couture et les choses de la terre ; tant et si bien qu’elles reconstituent dans une certaine mesure l’enseignement agricole. Et l’on ne saurait trop encourager, admirer cette décentralisation du devoir social, si longtemps paralysée par la centralisation parisienne. Les belles dames qui fondent des œuvres par centaines dans les grandes villes, se doutent-elles que par là même elles contribuent à dépeupler nos campagnes, à développer la mendicité, la maladie, à s’appauvrir elles et leurs familles, surtout à appauvrir la France ? Savent-elles que si elles avaient fait, pour les paysans, le quart de ce qu’elles ont fait ailleurs, elles auraient détourné les émigrans des fausses délices de la vie d’employé, de la vie citadine, conjuré en partie la crise, préservé les foyers de l’abandon, resserré les liens de solidarité et de confiance sympathique ? Elles auraient montré à des milliers d’êtres les dangers des existences bohèmes, des existences de chemineau, la douceur du home, de la maison paternelle, nid d’âmes, nid de petits bonheurs, les bienfaits du soleil, de l’air nourrissant qu’on respire à pleins poumons, de la terre qu’on embellit comme les