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à travers le dédale des lois, dans leurs rapports avec l’administration et les entreprises de transport.

Dans cette manifestation économique des syndicats, les laiteries et les sucreries coopératives jouent un rôle assez important. Sans parler des vieilles fruiteries de la Franche-Comté et de la Savoie, les laiteries coopératives depuis dix-huit ans ont à peu près ressuscité l’agriculture dans la Charente-Inférieure, la Charente, les Deux-Sèvres et la Vendée. Le phylloxéra avait détruit les vignes vers 1880, le découragement gagnait de proche en proche, les terres abandonnées n’étaient plus qu’une charge pour les propriétaires ; la viticulture, profession héréditaire, une fois tombée, tout semblait perdu. Mais quelques hommes avisés montrèrent à leurs concitoyens que les terres pouvaient rendre et fourrages et céréales, ils les poussèrent vers les laiteries coopératives ; leurs paroles, leur action, déterminèrent une révolution économique. La production du lait a remplacé celle du vin ; des communes où l’on comptait autrefois quatre vaches en ont aujourd’hui quatre cents ; une propriété de 140 hectares, inculte, achetée en 1889 trois cents francs l’hectare, nourrissait en 1900 une tête de gros bétail par hectare, et rapportait un profit net de 40 000 francs.

L’Association centrale des laiteries coopératives a réalisé d’énormes progrès dans le matériel, la fabrication, organisé le transport des beurres à Paris par wagons frigorifiques, affectés au service exclusif des laiteries, et escortes d’agens convoyeurs ; un camionneur attitré livre les marchandises aux destinataires. Beaucoup de coopératives ont installé des machines à glace ; aussi les beurres des Charentes jouissent-ils d’une légitime réputation sur le marché parisien. Dans quelques laiteries, on fabrique aussi du Camembert, du fromage de Hollande, du lait stérilisé. Ce n’est pas tout : l’Association se charge de faciliter les relations commerciales, de faire certains achats, d’appuyer les demandes qui intéressent les sociétés : et elle constitue une sorte de tribunal arbitral pour les difficultés qui peuvent survenir entre les laiteries voisines.

Les sucreries agricoles coopératives méritent une mention spéciale. Celle de Wavignies (Oise) a pour objet la fabrication du sucre de betterave et la vente de tous les produits de cette fabrication ; les associés doivent posséder un nombre d’actions proportionnel à l’importance de leur culture, une action par hectare de culture : tous les produits sont répartis proportionnellement aux fournitures de betteraves, suivant le poids et la richesse saccharine