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la pose des lignes télégraphiques sous-marines, ont beaucoup contribué à augmenter nos connaissances en précisant, grâce à la multiplicité des coups de sonde, le tracé des aires et lignes isobathes. Néanmoins il s’en faut que nous sachions tout ce que nous devrions savoir. La sonde est aveugle et ne garantit que le point même qu’elle a touché. Suivant certaines directions qui sont généralement celles des câbles, les coups de sonde se succèdent régulièrement, assez rapprochés les uns des autres pour fournir, par une sorte de profil en long, une idée suffisante du modelé sous-marin. Il est, en revanche, d’immenses espaces, dépassant certainement en étendue la moitié du lit océanique, à l’égard desquels nous demeurons dans une ignorance presque complète. Une œuvre de coopération internationale actuellement annoncée remédiera bientôt, il faut l’espérer, à ce regrettable état de choses, indigne de la science moderne, et permettra de procéder à la confection d’un document tellement indispensable à la navigation et à l’industrie, que même sans méthode, sans vues d’ensemble, il ne cesse de s’élaborer.

En outre de la forme du lit océanique, il importe de chercher à connaître la nature, très variable selon la localité, du sol qui le constitue. L’intérêt en est à la fois pratique et théorique. La diversité du sol en tel ou tel endroit sert au navigateur pour guider son navire. De nombreux sinistres, chaque année, seraient évités si, au voisinage des terres, alors que la vue est bouchée par le mauvais temps, les rafales de pluie ou la brume, les marins se renseignaient sur leur position par un coup de sonde, opération maintenant rapide et facile grâce au sondeur Thomson. Il est vrai qu’il faudrait pour cela posséder des cartes lithologiques précises et par conséquent, puisque nous ne les possédons pas, commencer par les dresser. La résistance active et passive à ces sortes de travaux est malheureusement incroyable, dans notre pays. L’industrie des pêches, elle aussi, a besoin d’être renseignée sur la nature du fond, en relation étroite avec la faune qui l’habite. Le laboureur ne sait-il pas que les mêmes plantes ne croissent pas sur des terrains rocheux, sableux, calcaires ou argileux ? L’art militaire naval ignore encore trop souvent sur quel terrain, solide ou sans cohésion, il dépose ses torpilles ou dans le voisinage duquel s’enfoncent les sous-marins.

Au point de vue scientifique absolu, la nécessité n’est pas moins impérieuse. La constitution d’un sol renseigne sur sa genèse, sur