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des villes et de l’Etat, la révision de la loi sur les Trade-Unions et le chômage, le suffrage universel. Et ils se séparent après avoir montré, en décidant de remplacer leur ancien titre par celui de Labour Party, qu’ils se refusaient à dépasser le cadre primitivement tracé. Le parti ouvrier anglais ne veut être qu’un syndicat politique d’intérêts corporatifs.

Le même utilitarisme caractérise sa tactique parlementaire. Malgré les gages donnés par les radicaux à la cause ouvrière, et les services rendus par les organisations libérales aux candidatures ouvrières[1], des francs-tireurs du socialisme, en des articles soigneusement reproduits par la presse conservatrice, saluaient dans l’avènement du parti ouvrier beaucoup moins un succès sur les unionistes qu’une défaite des libéraux. Le nouveau groupe parlementaire, avec la coopération des Irlandais, se servira de l’opposition conservatrice pour ruiner la majorité ministérielle, disloquer l’un des partis séculaires, faire œuvre révolutionnaire. Robert Blatchford écrivait dans The Clarion, le 2 février : « Il est inutile de dépenser de la salive dans des discours comme ceux de M. Haldane à Edimbourg. Les socialistes ne peuvent être ni achetés, ni conciliés. Aucun compromis n’est possible. Un sacrifice de cinquante centimes par louis ne servira de rien. Toutes les promesses sont inutiles. Même si le parti libéral pouvait actuellement donner, — je ne dis pas promettre, — la moitié de ce que les socialistes demandent, la paix n’aurait pas lieu. Il faut que nous ayons tout. La bataille doit être décisive. Le mouvement socialiste n’est pas une petite révolte locale qu’on peut apaiser par de douces

  1. Sous l’impulsion du Liberal Central Office dirigé par M. George Whiteley, de nombreux groupemens locaux avaient décidé de soutenir des candidatures ouvrières. La presque-unanimité des Lib-Lab ont été élus avec l’appui officiel des organisations libérales. C’est ainsi qu’elles ont singulièrement facilité la victoire de Burns à Battersea, de Bell à Derby, de Johnson à Gateshead. Il a été décidé de ne pas opposer de concurrens aux leaders du Labour Representation Committee, Shackleton, Henderson, Keir Hardie, T. Richards, J. R. Macdonald. Sur 37 candidats du L. R. C, élus dans des circonscriptions ayant droit à un seul siège, 15 seulement eurent à lutter contre des Libéraux. Sur 13 candidats du L. R. C. dans des circonscriptions ayant droit à 2 candidats, 3 seulement eurent à lutter contre 2 Libéraux. Sur 30 candidatures, 32 eurent l’appui officiel ou officieux des Libéraux.