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et très efficace mesure serait celle qui permettrait la création, dans chaque village, d’une garde communale volontaire : c’est le système qui avait été appliqué avant 1901, avec tant de succès, à Monastir, par le vali Halil Rifaat-Pacha ; dans chaque commune, un certain nombre de paysans, proposés par les municipalités sous leur responsabilité et agréés par les officiers de la gendarmerie, seraient armés et chargés de veiller à la sécurité du village ; si une bande survenait, ils lui résisteraient, et les gardes des communes voisines accourraient à la rescousse. Ainsi les habitans, qui sont les plus intéressés à l’ordre et à la sécurité, seraient eux-mêmes chargés de l’assurer ; ce système rendrait très vite la situation intenable pour les bandes. Si les Turcs acceptent cette organisation, ils trouveront avant peu, dans les habitans eux-mêmes, la police la plus capable de venir à bout des insurgés. C’est évidemment par suite d’une confusion que la réponse anglaise du 4 avril parle de gardes champêtres et objecte que cette réforme coûterait trop cher ; au contraire, les villages feraient eux-mêmes les frais, d’ailleurs presque nuls, de cette garde civique qui n’aurait rien de commun avec les gardes champêtres dont l’institution, déjà essayée, a donné de très mauvais résultats. Les paysans macédoniens, dans leur majorité, ne désirent, après tant d’années de troubles, de massacres et de pillage, que le calme et la sécurité ; ils sont désabusés des propagandes nationales.

La note russe constitue donc un programme complet et pratique de réformes. L’Angleterre y a répondu le 4 avril : elle en accepte les points principaux et abandonne, en fait, sa proposition, évidemment inacceptable, de diminution de l’effectif militaire en Macédoine. Elle insiste surtout sur la nécessité d’obliger la Porte à combler le déficit du budget macédonien, comme elle s’y est engagée au moment où l’Europe lui a accordé l’augmentation de 3 pour 100 sur les droits de douane ; elle menace de ne plus reconnaître cet accroissement tant que le gouvernement ottoman n’aura pas, sur ce point, rempli ses engagemens. Dans l’ensemble, l’Angleterre se rallie à la proposition russe. La France, constate M. Isvolski, a mis « un empressement tout particulier à appuyer son alliée. » On attendait avec le plus vif intérêt la réponse de Berlin, et l’on n’a pas appris sans quelque surprise que non seulement le prince de Bülow y donne son adhésion en principe, mais qu’à Vienne, où il s’est arrêté ces jours