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pensée, il ne s’agissait pas seulement de résoudre les difficultés pendantes, mais encore d’en prévenir le retour par un ensemble de mesures appropriées. Combien de fois n’a-t-on pas entendu dire, soit du côté des ouvriers, soit du côté des patrons, que le travail était à l’état inorganique et qu’il était urgent de l’en faire sortir ! Les ouvriers cherchent à le faire au moyen de leurs syndicats et de la Confédération générale du travail : les patrons, en présence de l’exemple qui leur est donné, resteront-ils dans une inertie qui serait pour eux dangereuse ? Ils peuvent en sortir par deux moyens : ou par une organisation exclusivement patronale, comme celle des ouvriers est exclusivement ouvrière ; ou par une organisation mixte qui, comprenant à la fois des patrons et des ouvriers, les habituerait les uns et les autres à comprendre et à sentir la solidarité de leurs intérêts. Ce second type d’organisation est certainement le meilleur : c’est celui que les entrepreneurs de la maçonnerie ont préféré. Ils ont donc arrêté les lignes générales d’un projet d’Union entre eux et leurs ouvriers, Union qui serait une « œuvre de solidarité et de prévoyance, » et dont ils prendraient à peu près tous les frais à leur charge. Elle se composerait, en effet : 1° de membres sociétaires cotisans, — ce seraient les patrons ; — 2° de membres associés non cotisans, — ce seraient les ouvriers ; — 3° de membres honoraires qui, eux aussi, verseraient une cotisation. Les ouvriers, simples associés, n’auraient rien à payer. Il leur suffirait d’adhérer à l’Union, — d’où ils pourraient d’ailleurs se retirer quand ils le voudraient, — pour jouir des avantages qu’elle est destinée à leur procurer, avantages qui se rattachent à la création d’organisations : 1° contre la maladie et le chômage ; 2° au bénéfice des veuves et des orphelins ; 3° pour les retraites.

Et ce n’est pas tout. L’Union aurait encore pour objet de procurer à ses associés ouvriers, qu’ils soient ou non syndiqués, un minimum de salaire fondé sur un minimum de travail. Les patrons s’engagent à donner tout le travail dont ils disposent aux associés, et à ne recourir à d’autres que si le nombre des premiers était insuffisant pour assurer le travail. Les ouvriers s’engagent de leur côté à ne travailler, pendant la durée de leur contrat, que chez les entrepreneurs adhérens à l’Union. Toutefois, lorsque le minimum d’heures garanti par l’Union sera atteint, l’ouvrier sera libre de travailler pour d’autres entrepreneurs si l’Union n’a plus de travail à leur donner. Quelques personnes regrettent les corporations de l’ancien régime ; nous ne sommes pas de leur avis ; les corporations d’autrefois étaient fondées sur le privilège, comme la plupart des