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Paris en ayant soin de dire que nous n’avions plus rien fait nous-mêmes, suivant la recommandation. Que nous répond-on ? Toujours la même chose : Ne faites rien… (9 février). »

L’Empereur se décida à écrire la lettre que Fleury sollicitait, mais elle ne fut pas tout à fait telle qu’il l’aurait souhaitée : « J’approuve fort votre conduite à Pétersbourg et je crois que vous pouvez m’y être utile en contribuant à maintenir les bonnes relations entre l’empereur Alexandre et moi. Par le temps qui court, il n’y a guère de grands projets à former ; tous vos efforts doivent se borner à créer une entente par des conversations bien plus que par l’énoncé de projets arrêtés. Ici les choses vont assez bien ; cependant les ministres sont trop engagés avec le Centre gauche, ce qui souvent amène des tiraillemens dans le Conseil. Le vote du 24 février sur les candidatures officielles a été désastreux[1]. Il faut pourtant que le ministère reste, mais je n’accorderai aucune diminution, soit de la Garde, soit de la Ligne (1er mars). »


VIII

A l’égard de l’Allemagne les instructions de notre ministre des Affaires étrangères furent moins satisfaisantes : aux recommandations de réserve et de prudence qu’elles contenaient se mêlaient des sous-entendus comminatoires, qui, certes, n’étaient pas dans la pensée du Cabinet. On les retrouve surtout dans une lettre confidentielle à Benedetti : « Je crois opportun de suivre, quant à présent, au dehors, une politique d’apaisement et de concorde, d’éviter toute parole, toute démarche qui pourrait, sans une nécessité démontrée, soulever des difficultés de gouvernement à gouvernement. Nous avons assez à faire chacun chez nous, pour ne pas chercher des embarras au dehors. Je recommande la prudence, la réserve à tous ceux qui représentent la France, particulièrement là où les susceptibilités seraient faciles à exciter. Mon intention est de ne soulever aucune question et de ne pas hâter les solutions que le temps peut amener.

  1. L’Empereur se trompait en attribuant notre rejet du système des candidatures officielles au désir de satisfaire les exigences du Centre gauche. J’avais combattu ce système des candidatures étant un des Cinq, alors que le Centre gauche n’existait pas encore. On verra que, bientôt après, l’Empereur ne trouva plus « désastreux » le vote du 24 février.