Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 48.djvu/248

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelque dix ans l’instruction tactique de l’armée française sera devenue ce qu’elle doit être.

Plusieurs semaines avant les grandes manœuvres du Centre, le général de Lacroix, futur directeur de ces manœuvres, fit envoyer aux états-majors intéressés : l’instruction générale, l’instruction sur le service de l’arbitrage, l’ordre de bataille, les thèmes généraux et particuliers, enfin un tableau de renseignemens sur les ressources en eau et en cantonnemens du théâtre d’opérations.

De ces cinq documens nous ne retiendrons que les deux premiers et l’avant-dernier.

Parmi les prescriptions de l’instruction générale applicables à toute la durée des manœuvres, on signale celle, très importante, qui consiste à faire distribuer aux officiers de tous grades, avant l’action, le thème du parti auxquels ils appartiennent, puis à exiger que, pendant la lutte, l’officier se rende compte de la situation de sa troupe par rapport à l’ensemble, en particulier aux unités voisines de la sienne, et qu’il sache apprécier les événemens dont il est témoin.

Au sujet des manœuvres d’armée contre armée, l’Instruction du général de Lacroix porte que, du 13 septembre, cinq heures du matin au 18 septembre inclus, « les opérations seront conduites comme à la guerre ; » mais elle ajoute : « Les hostilités seront suspendues, chaque jour, de midi à sept heures du soir, et les chefs de parti considéreront que les résultats acquis par eux, à midi, seraient ceux qu’ils auraient obtenus, dans la réalité, à la tombée de la nuit. »

A la guerre, les opérations ne sont suspendues qu’en cas d’armistice, et c’est fort rare.

Pourquoi donc a-t-on prescrit de suspendre, chaque jour, les hostilités de midi à sept heures du soir ? C’est que l’on a voulu faire cantonner, journellement, les troupes, à l’exception des avant-postes.

Pendant la guerre de 1870, le bivouac sous la tente-abri était de règle dans l’armée française, laquelle ne savait même pas comment on cantonne. Les grands avantages matériels obtenus par les Allemands, qui savaient cantonner, eurent pour résultat de mettre le cantonnement très à la mode chez nous et de faire renoncer absolument au bivouac. En revanche, les Allemands ont adopté, depuis quelque vingt ans, une tente-abri légère,