Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 48.djvu/897

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

donner des garanties contre un régime qui gouvernerait dans l’intérêt unique de la minorité catholique ou de la colonisation germanique, au détriment de la grande majorité orthodoxe et musulmane[1]. Il n’y aurait rien d’humiliant pour l’Autriche à déclarer à la Conférence qu’elle est résolue à le faire. Elle pourrait aussi s’en rapporter aux puissances pour fixer la part de la dette ottomane qui revient à la Bosnie.

A la Serbie, il pourrait être entendu que l’on donnerait une place dans la Commission du Danube, que les puissances lui faciliteraient financièrement la construction du chemin de fer destiné à la relier avec le Monténégro et avec la mer : la ligne aboutirait au point choisi par elle, d’accord avec le Monténégro ; l’Autriche lui en garantirait par traité le libre usage. Le Monténégro obtiendrait l’abrogation de l’article 29 du traité de Berlin concernant Antivari ; l’Autriche pourrait lui céder la commune de Spizza qui domine Antivari, ou du moins s’engager à la considérer comme neutre et à n’y pas élever de fortifications.

L’Autriche a retiré ses garnisons du sandjak de Novi-Bazar. Il serait très rassurant pour l’Europe de l’entendre déclarer que ce retrait signifie que l’annexion de la Bosnie est une liquidation du passé, non un nouveau pas vers l’avenir sur la route de la Macédoine. On a vu l’importance qu’auraient de pareilles assurances, données par le souverain universellement respecté qu’est l’empereur François-Joseph, pour la paix générale et pour le bon accord entre l’Autriche et la Russie. Les Serbes suggèrent qu’en leur donnant une bande de territoire bosniaque qui les relierait au Monténégro, l’Autriche manifesterait sa résolution de renoncer à la marche vers Salonique. Nous croyons, pour notre part, que l’Autriche consentira difficilement à une cession de territoire et que l’on s’engagerait par là dans la voie dangereuse des partages et des solutions provisoires. Si la Serbie et le Monténégro obtiennent satisfaction quant au statut futur de la Bosnie, c’est là, pour eux, s’ils n’ont vraiment en vue que l’intérêt de leurs frères serbes, l’essentiel ; c’est la solution qui laisse les voies ouvertes à l’avenir.

La question bulgare est plus facile à résoudre. Le prince Ferdinand, en proclamant l’indépendance de son pays et en prenant le titre de tsar, a été soutenu par l’approbation enthousiaste

  1. Orthodoxes : 43 p. 100 (760 000) ; — musulmans : 35 p. 100 (590 000) ; — catholiques : 21,30 p. 100 (360 000).