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Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 49.djvu/751

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irritant où ils étaient maintenus depuis trop longtemps ; une telle entente eût assuré à ces régions une stabilité internationale qu’elles ne trouveront peut-être pas sous le régime exclusif qui leur a été imposé. La France, qui eût traité dans une meilleure position, s’était préparée, dès juin 1898, à cette suite nouvelle et plus élargie encore de la discussion ; les nécessités qu’elle comportait avaient été envisagées et débattues par les hommes d’Etat responsables.

Après quatre ans d’efforts, la plupart des affaires pendantes avec l’Angleterre et qui encombraient, pour ainsi dire, le marché des concurrences coloniales, étaient réglées ; partout dans le monde, au Siam, en Chine, sur le Mékong, à Madagascar, en Tunisie, à Sierra Leone, à la Côte occidentale, au Niger, la persévérance d’une diplomatie conciliante avait mis fin aux vieux conflits. Le tout s’était fait de bonne grâce et à la satisfaction mutuelle des deux parties. L’expansion coloniale de la France atteignait ses limites. Les grandes rivalités étaient amorties.

Il ne restait plus qu’à boucler sur le Nil et en Egypte.

Ces résultats entrevus ne justifiaient-ils pas l’effort accompli ? Aller chercher, au nœud du litige, le nœud de l’entente, s’efforcer de ménager, en cette difficulté suprême, l’intérêt et l’honneur des deux pays, trouver, dans ce débat, les modalités d’une réconciliation équitable, légitime, telle était la conception qui avait dominé ce drame diplomatique et que, seuls, des entraînemens momentanés, des passions maladroites et le caprice du destin ont rayée des possibilités de l’histoire.

Lord Salisbury, qui connaissait, pour avoir présidé à la plupart des négociations coloniales, les tendances conciliantes du gouvernement français, le ministre qui avait fait, à la fin de 1895, les propositions relatives à Dongola, comprit certainement, avec sa haute clairvoyance philosophique, le vrai sens des paroles par lesquelles M. de Courcel relevait ses propres ouvertures du début de septembre. Il n’opposa pas encore, à la proposition de délimitation amiable, un refus absolu : « Après avoir réfléchi très sérieusement à mes paroles, lord Salisbury me dit qu’il ne connaissait pas assez la géographie des territoires de l’Afrique pour me répondre, dès à présent, au sujet d’une délimitation ; que, d’ailleurs, il ne pouvait entrer dans des projets de ce genre avant de s’être mis d’accord avec ses collègues du Cabinet qui étaient dispersés en ce moment. »