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on n’est point de Paris, on ne saurait concevoir le plaisir de traverser la rue Bourtibourg ou la rue des Francs-Bourgeois. » Et qui ne sait que le Parisien est, par-dessus tout, un badaud ? Il s’en va par les rues, d’un pas de promeneur, les mains derrière le dos, le nez au vent. Tous les spectacles l’amusent et il s’y attarde ingénument. « Je n’avais jamais vu l’élection d’un président de la République, » déclare M. Hallays au début d’un article où il va se mettre en devoir de nous décrire ce qu’il vit à Versailles au mois de février 1899. Oh ! combien nous sommes de bons Français, qui n’avons jamais vu comment on élit un président de la République, qui ne contemplerons jamais une élection présidentielle et qui vivons très bien sans cela ! Mais ce spectateur des grandes journées de Congrès assistera avec une curiosité — dirai-je égale ? — à la Fête des Fleurs ou aux concours du Conservatoire, à un dimanche du Jardin des Plantes ou à une soirée des Folies-Bergère. Il ira visiter la maison de Gustave Moreau ; il sera là le jour où on découvrira le Monument aux Morts de Bartholomé. Notez que, depuis ce dernier quart de siècle, la curiosité du Parisien s’est élargie. Celui d’autrefois, celui dont nous avons pu connaître encore le type devenu légendaire, ne sortait guère des limites de sa bonne ville. Celui d’aujourd’hui a cédé à l’universelle manie voyageuse. On n’est pas parfait. Même il trouve du plaisir hors de chez lui. Il s’adapte à d’autres conditions de vie, il s’harmonise à un autre milieu, il sait en dégager l’âme de volupté. Voici des pages où M. Hallays analyse le « charme de Munich. » Vous trouverez notre Parisien voyageur aux quatre coins de l’Europe, mais là surtout où l’attirent, comme à Majorque, les douceurs d’un climat privilégié, ou comme à Munich, à Weimar, à Amsterdam, des souvenirs de littérature et d’art. Un pays le séduit entre tous, parce qu’il est celui où la complexité de l’esprit moderne trouve davantage à se satisfaire : c’est l’Italie. Nulle part ailleurs, chaque fois qu’il sortait de France, M. André Hallays n’est revenu plus souvent et n’a plus longtemps prolongé ses séjours.

Cette curiosité, aussi bien que dans les rues de Paris et sur les chemins d’Europe, il l’a promenée par toutes les routes de la littérature et de l’art. Je ne connais guère aujourd’hui d’homme qui ait une intelligence plus ouverte et une plus riche culture d’esprit. Humaniste, élevé dans le culte de notre littérature classique dont il a le sens le plus délicat, il n’a cessé d’être à l’affût des nouveautés qui nous viennent de l’étranger. Le premier volume qu’il ait publié commence par une étude sur l’influence des littératures étrangères. Il