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Ces appréciations bienveillantes, desquelles on peut dire que l’avenir les a justifiées, étaient bien faites pour engager l’impératrice Catherine à donner suite à ses projets. Avec son esprit de décision, elle en trouve promptement la forme pratique. Sans doute, étant donné l’âge des princesses, dont la plus jeune n’est encore, à vrai dire, qu’une enfant, il ne saurait être question de les marier de si tôt. Si c’est Louise qui doit devenir la femme d’Alexandre, il faudra attendre un an ou deux, et plus longtemps encore, si c’est Frédérique. Mais l’Impératrice est pressée de les connaître. Elle considère même qu’il sera bon que celle qui devra entrer dans la famille impériale ait vécu, pendant quelque temps, à la Cour de Russie, avant de se marier, en ait pris les habitudes et se soit familiarisée avec le milieu où elle est appelée à vivre. De là, tout un plan qu’elle charge Romanzoff de faire aboutir.

Il faut obtenir des parens des princesses qu’ils consentent à les lui envoyer. Elle souhaiterait que leur mère les accompagnât. Mais, si c’est impossible, il suffira qu’on les conduise à Aix-la-Chapelle où se trouveront à propos la comtesse douairière Schouvaloff et le chambellan Strélakoff, sous la garde desquels elles feront le voyage. « Je me charge d’achever leur éducation et de les établir toutes les deux, écrivait Catherine à Romanzoff. L’inclination de mon petit-fils Alexandre guidera son choix. Celle qui restera, je chercherai à l’établir en son temps. Arrivées à Pétersbourg, elles demeureront dans mon palais, dont l’une, j’espère, ne sortira jamais, et l’autre pour être mariée convenablement. Quoique, assurément, leur âge pourrait faire remettre d’une couple d’années leur venue en Russie, j’ai pensé qu’en y venant dès ces heures, ce même âge rendrait l’une ou l’autre d’autant plus propre à s’accoutumer au pays dans lequel elle était prédestinée à passer le reste de ses jours, et que l’autre ne manquerait pas pour cela d’un établissement convenable à sa naissance. »

La maison de Bade entretenait avec la famille impériale de Russie des relations affectueuses et les brillantes propositions que lui apportait Romanzoff ne pouvaient être interprétées que comme un témoignage nouveau de la bienveillance de Catherine. Assurément, pour les parens des petites princesses, il serait cruel de les voir partir, alors que la sollicitude maternelle leur était encore si nécessaire et la séparation ne serait pas moins