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à cette union, que l’un des conjoints accepte comme une bonne fortune, et que l’autre subit comme une condition de salut. Le tête-à-tête qui suit forme une scène mêlée agréablement de galantes entreprises et de résistance indignée. Elle s’achève par le renoncement généreux du héros, qui jette au feu l’acte de mariage et rend sa virginale épouse à la liberté.

Second acte. Six ans après, en quelque petite ville allemande et dans le monde des émigrés. Le marquis donne des leçons de français. Sa fille, sa sœur, avec leurs compagnes d’exil, ont ouvert un magasin de modes. Personne au surplus ne soupçonne rien du mariage blanc, que Solange elle-même, à laquelle un sien cousin fait la cour, semble avoir oublié. Elle en retrouvera bientôt la mémoire. Des soldats français — et vainqueurs — traversent la ville : les mêmes qu’autrefois, et conduits par le même Bernier, à cela près que, de lieutenant, il est devenu général. Et le général étant entré dans la boutique, pour faire mettre à son chapeau des plumes neuves, la reconnaissance a lieu, non sans quelques menues péripéties tour à tour spirituelles et sentimentales. Par amour à présent, par malice aussi, pour confondre à la fois les prétentions d’un freluquet de rival et les préjugés d’une belle-famille ébahie, le gendre inopiné déclare son mariage avec Solange, et le déclare valide, la copie de l’acte civil ayant seule été brûlée. Un bal, ce soir, est offert aux officiers ; le général y conduira celle qui n’est qu’à moitié (et encore tout au plus), mais dont il a bien résolu de faire tout à fait sa femme.

Le troisième acte (à Paris, après le retour de l’émigration), va résoudre toutes les difficultés et lever tous les scrupules. Il suffit pour cela que le marquis ait trempé, — légèrement et du bout du doigt, — dans l’affaire de la rue Saint-Nicaise. Bernier, d’un seul mot, l’en tirera. La peur d’abord, ensuite la reconnaissance, fera son œuvre dans l’esprit du vieux gentilhomme, tandis que l’amour achèvera la sienne dans le cœur de Solange. Alors ce trop longtemps imparfait hyménée verra fixer en quelque sorte ses liens, et vous comprenez à présent pourquoi nous disions tout à l’heure que la fin de cette aimable aventure est le contraire d’un dénouement.

La partition de M. Salvayre ne laisse pas d’être agréable par endroits. Elle eût pu l’être plus souvent encore, et davantage, si le musicien avait eu la volonté plus ferme et plus pure d’un style dont il a montré plutôt la velléité. Il fallait faire ici, résolument et constamment, de l’opéra-comique ; n’abandonner, tout en les renouvelant s’il était possible, aucune des conditions du genre. Ici le parler même,