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personnel. Dans les recettes on ne peut omettre celle-là. Bien qu’elle atteigne un chiffre considérable, elle n’a pas été toujours proportionnée aux besoins.

Faute d’abord d’une politique maritime assez prévoyante pour ménager leur délai aux changemens d’orientation technique, on s’est trouvé poursuivie en même temps la réalisation de plusieurs conceptions différentes : celle de la veille à peine ébauchée et celle du lendemain qu’il fallait mûrir en toute hâte, sans compter celle de l’avant-veille, encore en possession du matériel existant. Nous nous fournissions pour une triple politique, — insuffisamment des trois côtés, — en triplant néanmoins les faux frais. Or on voulait peu dépenser. Par ces temps de déficit chronique, c’est la marine qu’on songe d’abord à rationner. Elle n’est qu’un service national, non le plus évidemment indispensable ; elle ne satisfait point d’intérêts de classe ni de coteries. Aussi quel personnage accessoire, dans un conseil des ministres, qu’un successeur de Colbert ! Il n’obtient guère, car il n’a guère à donner. Tandis que le pays n’hésita jamais devant les sacrifices demandés au nom de sa marine, que les Chambres ne refusèrent point les crédits, combien de fois le gouvernement ne s’abstint-il pas d’en solliciter de nécessaires ! Non que le régime ménageât les finances nationales. Mais un président du Conseil, un ministre du Trésor avaient à y puiser pour des œuvres plus profitables à leur popularité.

Représentons-nous la scène annuelle. L’administration navale vient d’établir son projet de budget. Y sont compris naturellement les crédits d’exécution des lois votées par les Chambres pour la construction des navires prévus sur état, l’aménagement progressif des bases d’opération métropolitaines ou coloniales, etc. Les règlemens en vigueur, tels que ceux relatifs à la constitution d’approvisionnemens, y reçoivent aussi satisfaction. Comme les escadres s’augmentent, de par la concurrence mondiale, comme les bateaux, plus énormes, coûtent plus à créer et à entretenir, il est habituel que, d’une année à l’autre, le chiffre total accuse un accroissement. Au premier coup d’œil, le ministre sursaute. Il demande à ses subordonnés de resserrer leurs évaluations. Le projet, revu, s’achemine vers les Finances, qui le retournent aussitôt : il ne faut pas que le total dépasse celui de l’année en cours. Nouvelle insistance auprès des directeurs, priés de réaliser toutes les économies compatibles avec