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un jour à s’épuiser, le Sud-Est fournit la houille blanche, que l’art de l’ingénieur, secondé par un reboisement intelligent, permettra de créer de plus en plus et d’utiliser de mieux en mieux. Perspective rassurante, mais an peu lointaine, que les Provençaux échangeraient volontiers contre un supplément immédiat de prospérité.


I

En suivant, le long de la vallée de la Durance, l’artère assez fréquentée de Marseille à Grenoble, il est possible d’aborder les Basses-Alpes soit par le Midi ou la Basse-Provence, soit par le Nord ou le Dauphiné. La première direction est celle que nous suivrons, au départ de Pertuis.

Désertes, sauvages et pittoresques en somme, les gorges boisées de Mirabeau se rattachent encore à Vaucluse et aux Bouches-du-Rhône et ce n’est que plus loin que le voyageur « montant » dépasse le point fictif sur lequel se heurtent quatre départemens provençaux sur cinq. Les premiers villages de notre territoire bas-alpin apparaissent enfin, tristes, grisâtres, dans un paysage déboisé, sillonné de « vabres » desséchés, mais assez cultivé, avec force champs de blé, amandiers, mûriers, vignes bien mal tenues et, sur les pentes de collines, olivettes très soignées, qui produisent la meilleure huile de Provence. Quelques villas précèdent Manosque, et vis-à-vis de la gare, se discerne le seul parc d’agrément digne de ce nom. A gauche, se dresse le Mont-d’Or, mal dissimulé sous les oliviers ; plus loin, vers la droite, on distingue les collines boisées qui bordent la rive gauche de la Durance : elles dépendent de Digne.

Puis apparaissent Voix et Villeneuve, entassés sur des mamelons coniques, dominés par des montagnes pelées d’aspect original, mais plus propres à satisfaire le peintre que l’habitant ou le touriste. La vallée se resserre ensuite et devient jolie avec ses prairies et ses bois ; le pin d’Alep, disparu depuis Mirabeau, tente un retour offensif et, les oliviers aidant, on se croirait dans le Var. Ce pin renonce à la lutte à la hauteur de Pertuis et vis-à-vis des pittoresques roches des Mées. Le chêne vert le supplante, mais le chêne blanc expulse à son tour ce dernier au bout de quelques kilomètres, ce qu’il a fait depuis longtemps déjà sur la rive gauche. Toutefois, sur les déclivités trop