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est celui de la Chine : le Japon est décidé à y supplanter la race blanche. Son but est de l’exclure de toute participation à l’exploitation des richesses de l’Asie. Si des experts ou des professeurs sont nécessaires, il se prépare à les fournir ; de même les bateaux, les machines ; et il estime que l’Asie ne devra pouvoir s’adresser à l’étranger que s’il se trouve lui-même dans l’impossibilité de fournir. Ceci ne sera fait que peu à peu, car le Japon a encore besoin du bon vouloir européen et il saura le ménager. Le principe de la porte ouverte sera solennellement reconnu ; mais son application sera plus difficile à obtenir. La Corée et la Mandchourie en donnent en ce moment l’exemple. L’égalité pour tous est reconnue, mais pratiquement, grâce à d’habiles et légales mesures, le commerce étranger est de plus en plus remplacé par le japonais.

L’essor du mouvement commercial et industriel du Japon est donc incontestable. On peut s’en rendre compte en regardant ce qui se passe à Shang-haï. Le fleuve Yang-tzé est la grande artère commerciale de la Chine. Il y a peu de temps encore, il n’était guère parcouru que par les Anglais. Depuis quelques années, les Allemands y sont venus, mais n’ont pas réussi. Maintenant, ce sont les Japonais qui, subventionnés, supplantent le commerce étranger. N’ont-ils pas le prestige de la victoire ? Avant 1907, il y avait déjà 3 compagnies de navigation. Au mois d’avril, ces compagnies, fusionnées sous le nom de Nisshin-Kisen-Kaisha, ont pris des services réguliers sur les lignes suivantes : Shang-haï-Hangkovv, Hangkow-lchang, Shang-haï-Soochow , Shanghaï-Hangkow, Chinkiang-Tsingkiangpu, Hangkow-Hsiangt’an, Hangkow-Ch’angte, lac P’oyang. Il y a quelques mois, à un banquet donné à Shang-haï, le président de la grande compagnie de navigation japonaise Nippon-Yusen-Kaisha disait : « On peut entrevoir l’avenir prochain où les navires européens ne passeront plus le canal de Suez pour commercer avec l’Extrême-Orient. » N’est-ce là qu’un rêve ? Les mers de Chine sont parcourues par des divisions de croiseurs cuirassés, qui font aussi bonne figure que les plus beaux spécimens anglais ou américains. Ceux qui sont venus dernièrement à Saigon ont produit dans notre Indo-Chine une impression sur laquelle il est inutile d’insister, « Nous montrerons notre pavillon de guerre, disent les Japonais, et notre commerce le suivra. »

L’activité japonaise est dirigée énergiquement vers la Chine