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caractère sacré du mariage ? Trouvera-t-il un amour mutuel et une confiance illimitée ? Mais il faut bien se prononcer. Il va donc tenter la démarche qui décidera de sa vie entière. « A l’heure dite, je fus introduit au salon. La princesse entra la première, suivie d’une autre et belle grande dame. Tout ce qui m’avait déplu disparut à l’instant. Je ne vis plus que le regard d’intelligence et d’amitié dont on me salua, et qui me pénétra comme un doux rayon de soleil jusqu’au fond du cœur et fondit comme glace mes doutes et mes scrupules. » Il est heureux. Il échange avec sa fiancée une tendre correspondance. « J’ai reçu de belles et chères lettres. Je vois s’ouvrir devant moi un monde nouveau de confiance et de certitude, un port sûr où me réfugier dans toutes les difficultés et les fatalités de la vie... Quelle consolation et quelle force cela donne de penser, au milieu de ses travaux, à une femme affectueuse et bonne ! Je ne puis assez remercier Dieu. » Le 16 février 1847, le mariage se célèbre à Francfort-sur-le-Mein, et les notes du prince contiennent les traces d’une joie sans pareille. Les jours qui suivent le mariage sont des jours incomparables. « Je n’éprouve d’autre sensation, dit-il, que cette disposition joyeuse de l’âme au printemps quand on est couché à l’ombre d’un arbre sur une montagne pas trop haute, et qu’on voit au-dessus de soi les nuages sillonner le ciel. Peu importe qu’au loin passent et repassent des nuées grisâtres, chargées de neige, je suis heureux, j’ai l’âme satisfaite et le cœur empli d’une infinie reconnaissance envers Dieu qui guide avec tant de bonté les pas de l’homme vers la bénédiction et vers la joie. »

Suivent alors des observations du plus haut intérêt sur la révolution de 1848, et sur la crise allemande attribuée à ce fait que le peuple comprend et regrette la nullité de l’Allemagne vis-à-vis des autres Etats. « Personne ne contestera que c’est un triste sort pour l’homme vigoureux et fort de ne pas oser dire à l’étranger : Je suis Allemand, ni arborer avec orgueil le drapeau allemand au mât de son bateau... Ce misérable bavardage, sur l’unité allemande et la nature allemande, ne cessera d’être ridicule et lamentable que le jour où ces mots ne seront plus des sons vides et des fanfares d’un doux optimisme, mais où nous formerons véritablement une grande et puissante Allemagne ! » C’est la tâche à laquelle le prince de Hohenlohe va consacrer la plus grande partie de ses efforts, collaborateur assidu et passionné