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entier à son zèle et à son amour pour la Prusse. Il n’hésite pas à affirmer que « la clique austro-franco-ultramontaine fera son possible pour mettre la Bavière en bloc à la discrétion de l’Autriche. » Mais d’après lui, ce dessein sera déjoué. La France ne se relèvera pas. Le comte de Münster affirme à Hohenlohe « que la défaite des Français cause en Angleterre une joie générale. » La princesse royale Victoria, partageant les idées de son mari, le kronprinz, se dit fort mécontente du traité conclu avec la Bavière et se montre favorable à l’Empire absolu sans exception. L’idée fédérative lui répugnait. Les propositions des ministres bavarois et hessois n’étaient pas mieux accueillies à Versailles. Le Wurtemberg réclamait la principauté de Hohenzollern. Darmstadt voulait un morceau du Palatinat, mais ces deux Etats furent éconduits par Bismarck, Et lorsqu’il s’agit de l’Alsace-Lorraine, les Prussiens qui la réclamaient répétaient le dicton : « Der Bien muss ! il faut que cela soit ! »

Le 30 décembre 1870, à la Chambre haute, le prince Clovis vota pour l’adoption du traité avec le Nord, malgré la limitation qu’il apportait à l’indépendance de la Bavière, et se félicita que ce pays eût repoussé la neutralité qui l’aurait conduit à s’allier avec la France et à s’écarter du chemin de la gloire et d’une immortelle renommée. « Qu’importe d’ailleurs le détail du traité, disait-il, auprès de ce point considérable de la reconstitution de l’Empire allemand ? »

Après la guerre, le prince Clovis est élu au Reichstag dans la circonscription de Forcheim-Kulmbach. Le 23 mars, il est nommé à la première vice-présidence et devient l’une des colonnes du parti libéral. Il est naturellement de toutes les fêtes et de toutes les réceptions. Il admire le prince de Bismarck, aussi bon mangeur, aussi bon buveur que bon politique, qui, avant de prendre la parole, engloutit une masse énorme d’huîtres, de harengs et de jambon arrosés de bière et d’eau de Seltz. Il remarque que, pour exciter sa soif, il avale des quantités énormes de caviar. Il l’entend prédire, au sortir d’une digestion laborieuse, que Thiers ne pourra désarmer la populace parisienne sans l’aide des troupes allemandes, puis déclarer que si la Bavière, à laquelle il avait fait de trop grandes concessions, n’avait pas signé le traité relatif à la restauration impériale, il s’en serait suivi une hostilité contre le Sud qui eût duré des siècles. Le prince Clovis constate que le chancelier n’a pas la vie aussi facile qu’on le suppose. « Moltke