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« Lysicrate s’est cassé la jambe en descendant un peu plus vite qu’il n’aurait voulu l’escalier de Thaïs... La prude Adine a fait un faux pas, on assure que le vieux Polémon va réparer le désordre de sa chute... »

Et comme Selon s’en indigne, Ésope lui fait comprendre, que « Polémon ruiné n’a plus de ressources, il meurt de faim ; Adine est riche, elle a besoin d’un manteau pour couvrir sa vertu..., » ainsi tout s’ajuste au mieux.

Pontchartrain, ci-devant ministre de la Marine et de la Maison du Roi, supplie, en 1734, le lieutenant de police de lui faire parvenir au fond de sa retraite les feuilles de nouvelles qui lui passent entre les mains : « Je vous les renverrais aussitôt. Un vieillard oisif est curieux d’être instruit et amusé : il y a de la charité à y contribuer ; je l’espère de votre bonté, » Voltaire, de quelque lieu où il se trouve, de Forges ou de Ferney, réclame avec acharnement l’envoi de ces journaux manuscrits. Il était l’un des abonnés d’un nouvelliste fameux, le chevalier de Mouhy.

La lecture des nouvelles à la main abrégeait la longueur des voyages en diligence. Le comte de Gabalis s’est mis en route. « Le carrosse, écrit-il, était plein d’officiers, de fort honnêtes gens qui avaient tous beaucoup d’esprit. J’admirai entre autres celui de Saint-Canal, lieutenant-colonel... Les premiers momens de notre voyage se passèrent à nous reconnaître et à nous faire des complimens. Bientôt après, on tomba sur les propos de guerre. Saint-Canal tira de sa poche un gazetin qu’il nous lut. Le premier article marquait que l’Electeur Palatin avait écrit à l’Impératrice mère que l’archiduc, son fils, serait bientôt élu empereur s’il voulait renoncer à l’Espagne. Le chevalier de Larivoire alors s’écria :

« — En vérité, l’Espagne nous fut toujours funeste !... »

Et la discussion de continuer.

Et, à côté d’une curiosité, très légitime en somme, se plaçait un motif impérieux pour le commerçant, l’intérêt de ses affaires. Prenons pour exemple cette partie si importante de l’industrie parisienne, la toilette. En 1714, les coiffures basses remplacèrent du jour au lendemain, sur un mot du Roi, les cornettes à trois étages. Quelle bonne fortune pour la modiste qui devait apprendre la première le désir exprimé par Louis XIV ! « La Reine, écrit Mercier, est l’arbitre de la mode, son goût fait la loi. » « On