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dont cet article faisait partie avait été déchiré par un double refus : celui de l’Empereur de se contenter du vague de l’article 5 et celui de Beust d’y substituer un engagement précis. Il est vrai qu’à Florence se préparait un traité italien, mais ce traité n’était qu’à l’état d’ébauche ; il contenait sur la question romaine un article qui eût paru plus inacceptable à l’Empereur que l’article 7 du traité autrichien, et il n’accordait pas un engagement plus formel que celui réclamé par l’Empereur et refusé par Beust.

Nulle part, on n’avait dit non ; mais, nulle part, on n’avait dit oui. A Florence comme à Vienne, on nous bernait par des ajournemens. Nous étions moins avancés le 6 août que le 15 juillet, lorsque nous commençâmes les pourparlers. Beust a résumé toute cette période dans ses Mémoires : « Je ne saurais nier que plus d’un mot trop peu pondéré ne se soit échappé dans les documens en question par la suite des événemens et par le trop de zèle du rédacteur de la minute, mais ce ne sont que des mots, ce ne sont ni des pensées, ni des actes. » En effet chaque fois que l’on a réclamé de Beust un acte quelconque, soit un déploiement de troupes vers la frontière de Saxe, soit une négociation avec la Russie, soit un traité sérieux, il s’y est refusé. Mais aucun des mots prononcés dans cette période ne saurait être considéré comme peu pondéré, échappé au trop de zèle du rédacteur de la minute. Dans tous les cas, Beust ne pouvait estimer tels ceux émanés de lui-même, dans des lettres confidentielles écrites de sa main. Il le sent et n’en est pas interloqué. « Il est possible, dit-il, que, dans une lettre particulière où on ne pèse pas toujours les mots, il se trouve des paroles rassurantes qui, dans l’état où en étaient les choses, ne pouvaient plus exercer une influence sur les déterminations du gouvernement français. »

Que deviendrait la foi publique et privée si l’on pouvait, après avoir pris un engagement, s’en tirer en disant lestement que dans une lettre privée on ne mesure pas ses expressions ? Et il ne s’agissait pas d’une lettre privée qui reste renfermée entre celui qui l’envoie et celui qui la reçoit, mais d’une lettre dont les termes devaient être répétés à un tiers intéressé à les connaître ? Prétendre que des paroles rassurantes pouvaient être envoyées impunément, sans exercer aucune influence sur les déterminations de l’Empereur est une énormité, car notre plan de campagne a dépendu de ces paroles rassurantes. L’Empereur