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était posée pour la seconde fois, d’une façon plus claire qu’il n’avait répondu la première.

Ce résultat, négatif en quelque sorte, a été une déception pour les deux partis. Le gouvernement, par ses attaques violentes et presque grossières contre la Chambre des Lords, espérait déterminer un mouvement populaire contre l’Assemblée aristocratique. Il n’y a point réussi ; la moitié de l’Angleterre est demeurée fidèle aux Lords dont l’ancienne popularité, peut-être ébranlée, n’est pas entièrement perdue. Les Unionistes espéraient, en surexcitant le sentiment national contre la dictature irlandaise, déterminer un mouvement populaire contre le gouvernement, el, sinon remporter la victoire, du moins gagner un certain nombre de sièges. Ils n’y ont pas réussi davantage. Au fond, la querelle entre Unionistes et Libéraux n’a point passionné le pays. Il y a eu environ 600 000 votans de moins qu’aux élections du mois de janvier précédent. La question du Veto des Lords n’a point surexcité les colères démocratiques, et celle du Referendum, soulevée dix jours avant le commencement des élections et qui était toute nouvelle, n’a pas eu le temps de pénétrer dans les masses profondes du suffrage populaire où elle n’a guère été comprise. Il ne faut point en effet juger du véritable esprit du pays par des meetings enthousiastes, mais un peu factices, composés d’électeurs triés sur le volet. La presse unioniste se plaît à faire remarquer que, si les députés libéraux égalent les députés unionistes en nombre, ils ont rassemblé moins de voix : 2 277 901 contre 2 926 908, et que, dans beaucoup de circonscriptions, le chiffre des majorités unionistes a augmenté tandis que celui des majorités libérales a diminué. Cela est exact, et s’il y a eu dans le corps électoral un mouvement et un déplacement de voix, il est plutôt dans le sens des Unionistes. Mais ce sont là consolations de vaincus. Le fait brutal est là : le gouvernement dispose d’une majorité de coalition qui s’élève à 126 voix. Que va-t-il en faire ? Ici nous sortons du domaine des faits pour entrer dans celui des conjectures.


VIII

Prévoir l’avenir et l’aire des prédictions est toujours un rôle singulièrement périlleux, surtout quand il s’agit d’un pays étranger. Aussi ne m’y hasarderai-je point. Je me bornerai à